Dire Straits
7.5
Dire Straits

Album de Dire Straits (1978)

Dit d'une traite sur le temps d'un Swing

Lorsque j'écoute Dire Straits, ce qui m'arrive fréquemment ces temps-ci, je me revois toujours dans l'ancienne Volkswagen de mes parents, voguant sur les autoroutes de France, le cul vissé sur mon siège de gauche à regarder les paysages ruraux défiler sous un regard des plus contemplatif. Je me revois partant en voyage familial, le coffre blindé jusqu'à ne plus pouvoir faire de marche arrière avec ce sentiment d'éternité en tête.


En voiture avec mes parents, on ne parlait que rarement, généralement seule la musique s'exprimait et résonnait dans l'habitacle pour provoquer chez nous quelques fredonnements et une allégresse mesurée. Lorsque les Beau Dommage, Goldman, REM et autres Billy Idol étaient épuisés jusqu'à la moelle, que les champs eux même en bordure de la route se changeaient peu à peu en morne horizon, se mettait alors, calé comme le messie au milieu de ses apôtres un bon cd de Dire Straits.


Je revois ma mère chanter à tue-tête à l'unisson avec les morceaux si bien que je fantasmais parfois son timbre comme ajouté à la mélodie. Ne voyant depuis le rétroviseur intérieur que ses yeux mirer la route, je ne pouvais que m'en convaincre, si jeune. Mon père émettait, de son côté, des sons quasiment inaudibles tandis que ma sœur dormait paisiblement. Depuis ma place, alors que mon monde reprenait vie, je ne pouvais que me sentir transporté d'une douce mélancolie, la voix de Mark Knopfler roulant sur moi comme autant de bitume et de kilomètres avalés. Sultans of Swing arrivait alors en point d'orgue, terrassant l'air maussade que j'arborais et que j'abhorrais pour me laisser aller à réellement entendre, entendre non pas seulement cet entraînant refrain ou encore ce solo magistral mais entendre chaque son, ressentir chaque claque que je recevais en plein visage avec pour accompagnement le ronronnement du moteur de la Volkswagen.


Un air de famille, le sentiment confortable d'être à sa place dans un moment temporel idéal, voilà ce que m'inspirait cet album que je continue aujourd'hui d'écouter avec le plus vif intérêt. Il m'arrive de ce fait, lorsqu'un trajet en train commence à s'éterniser de lancer Dire Straits et de simplement remonter le fil de ma mémoire vers un instant où plus rien n'avait d'importance, hormis le sensitif. Il y a des sonorités magiques qui arrivent même à vous transformer un ciel gris en moment d'égarement.


Lorsqu'une mélodie vous ramène à une vibrante expérience personnelle elle ne peut que vous toucher. Je n'ai d'ailleurs pas été le seul dans le même cas, connaissant la passion que nous partageâmes ma mère et moi pour ce bon vieux Knopfler lors de nombreux moments d'osmose non plus avec Dire Straits mais sur le temps d'un swing et d'une carrière solo (florissante) trop peu entendue.

Créée

le 1 févr. 2017

Critique lue 1.3K fois

37 j'aime

12 commentaires

Fosca

Écrit par

Critique lue 1.3K fois

37
12

D'autres avis sur Dire Straits

Dire Straits
ElDiablo
9

Critique de Dire Straits par ElDiablo

Le premier album de Dire Straits est une œuvre d'une qualité si rare... Mais au-delà de la qualité de générale de l'album, le talent et personnalité musicale de Mark Knopfler donne naissance à une...

le 19 mars 2013

24 j'aime

5

Dire Straits
Flavinours
8

"- Straits" "- Quoi ?" "- Ben, tu m'as demandé de dire Straits..."

« Dans la dèche », Mark Knopfler et ses comparses n’y sont plus vraiment. Plus de trente ans après la sortie du premier album de Dire Straits, on peut se rassurer pour leurs portefeuilles, après...

le 11 août 2012

11 j'aime

Dire Straits
mtf
8

The Voice, the Guitare

1er album d'un groupe de légende. En seulement 9 titres on comprend de suite que Mark Knopfler fera parti du paysage rock pendant de nombreuses années (et encore aujourd'hui, son dernier opus solo...

Par

le 13 mars 2013

4 j'aime

1

Du même critique

Juste la fin du monde
Fosca
8

Natural Blues

Bien malin celui qui parvient à noter sereinement ce film. Personnellement il ne m'est guère aisé de le glisser au sein d'une échelle de valeur. Dans tous les cas, une note ne pourra s'avérer...

le 22 sept. 2016

193 j'aime

13

Grave
Fosca
8

Deux sœurs pour un doigt

Bien que préparé à recevoir ma dose de barbaque dans le gosier sans passer par la case déglutition, je ne peux qu'être dans un tel état de dégoût et d'excitation à la fin de ce film qu'il me sera...

le 21 févr. 2017

135 j'aime

23

Mother!
Fosca
8

L'Antre de la Folie

Au commencement... Comment commencer à parler de ce film sans en révéler toute l'essence ? C'est bel et bien impossible. Le nouveau venu de chez Aronofsky n'est pas une œuvre dont nous pouvons parler...

le 8 sept. 2017

84 j'aime

18