Aaaaah... Les "crétins" de détroit. Le choc la première fois que je les entendus dans le bus qui me ramenait de la fac, il y a déjà 10 ans. Je ne pensais pas que j'allais apprécier l'iguane Pop. Je ne sais d'ailleurs plus pourquoi ; d'où venait les aprioris que j’avais sur sa musique, mais toujours est-il que je me suis pris une belle claque, tout comme la fois où je les ai vus en concert en 2005.
"Fun House" (1970) est le deuxième album des Stooges, est un album qui sonne "punk-rock" avant l'heure. Sans lui, il n'y aurait ni les Dead boys, ni les Ramones, et encore moins les Sex Pistols. L'album mélange habilement punk, blues, rock psychédélique barré et free jazz ("L.A Blues"), grâce aussi à la présence de Steven Mackay. Iggy était influencé par des artistes aussi divers que Howlin' Wolf, Jerry Lee Lewis, Les Rolling Stones, Bob Dylan (pour le côté "lettré et cultivé", qu'Iggy a également apporté dans le rock), mais aussi Sun Ra et John Coltrane ("A Love Supreme" bien sûr). On peut effectivement entendre, par le saxophoniste Steven Mackay une coloration très "free jazz" sur Fun House.
Dès le premier morceau "Down on the street", le riff d'intro ("metal" avant la lettre) lance Iggy qui paraît en transe, exulte et hurle comme un indien. Il jubile. Puis chante, encore mieux que sur leur premier album. Ron Asheton n'est pas un grand guitariste mais qu'importe, il marque de son jeu très personnel le "son" des Stooges par ses solos fiévreux et bluesy. Sur le long morceau psychédélique « Fun House », le fuzz et l’utilisation de la pédale Wah-wah rappelle Hendrix. La rythmique est parfaite sur tous les titres, Scott Asheton structure tous les morceaux de sa frappe lourde, brute, et inventive (l'ouverture de "Loose"...), et Dave Alexander lance d’incroyables lignes de basses qui conduisent admirablement le tout. Iggy, influencé par « la transe de la musique nord-africaine » (cf. Dictionnaire du rock), suscite des climats hypnotiques avec son chant exceptionnel, langoureux (il faut l’entendre dire «Said do you feel it, when you TOUCH ! - me?! » dans « Dirt »), fait de gémissements. Ecoutez-le aussi hurler « I Feel Alright !! » dans le titre « 1970 », d’une voix sauvage, aigüe et rauque, accompagnée par un riff fulgurant, manifeste punk-rock avant la lettre. Dans le morceau « fun house », Iggy crie de telle sorte qu’on croirait qu’il s’est pris un coup de poing dans le ventre. Fortement influencé par les Doors, les Who, les Stooges allaient plus loin encore que leurs ainés, surtout dans sur scène où Iggy se livrait à débauche d’énergie cathartique, inconsciente et d’une pureté absolue. Il gesticulait et dansait complètement nu, les sourcils rasés, vociférait, se roulait par terre, possédait la scène, agressait des spectateurs sans donner l’impression de savoir ce qu’il faisait. L’album se termine dans un morceau free jazz presque progressif, une explosion de larsens et de grésillements d’amplis Marshall, de cris inhumains, qui musicalement évoquent une sorte de débauche et de folie jamais entendue avant. Précurseurs du punk, anticipant toute la culture provocante des Sex Pistols, les Stooges frappaient un grand coup avec cet album.