T'as des matins comme ça où y'a rien qui va. Tu te lèves à six heures dans un relent de bière et de piquette à trois balles de chez monop´, t'as un putain de mal de crâne, les yeux gonflés parce que t'as tisé jusqu'à trois plombes après cendrillon... Alors t'enfiles un jean trop serré à te ravir ton premier né, deux trois fringues moches qui vont pas ensemble mais avec ton cuir t'as le look coco. T'es à la bourre et ce connard de train va pas attendre que tu dessoules, il en transporte déjà assez des avinés. Ton thé tu te l'envoie brûlant, tu penses que ça va te filer le cancer de la gorge mais merde, faut partir alors le cancer t'oublies. Et bordel, ta musique, faut que t'aies ta musique si tu veux pas t'endormir sur le clodo de la 7, et puis bon, hein, quitte à jouer les rats sous la poubelle ville du monde autant gratter le fond avec du son qui te décolle l'encéphalo. T'arbores ton armure casquée et t'affrontes le métro, te faisant coller par la populace qui va se coucher et celle qui, comme toi, va se faire emmancher dès 7:30. Il est six trente-cinq, putain t'as pas envie d'écouter du Santana. Santana il est bien sympa mais pas à cette heure là, merde, t'irais l'étouffer avec sa gratte, c'est dire comme t'es à fleur de peau. Suffirait qu'un bâtard avec son accordéon se pointe pour tu commences à péter des mâchoires alors Santana... Arrgh et puis ça avance pas, tout le monde t'emmerde, ça shlingue comme au zoo, bref t'es à bout, il te faut un truc qui te fasse mal, v´là que t'as la révélation : c'est partit pour le Crou, pour un sale petit Stup´ avec le son au max pour les quelques neurones que tu gardais en stock.
Là tu respires mon vieux. T'inhales la sueur de tes compères comme si c'était l'haleine ambroisée d'une saloperie de dieu de l'olympe qui viendrait te rendre visite. Par chance, tu viens d'arriver à ton arrêt. Faut encore que tu te faufiles dans un mouchoir de poche, que tu cours attraper un autre train mais là, je vais t'dire, t'en a rien à branler. T'émerges de la bouche de métro, le soleil t'accueilles comme une vieille branche, tu commences à t'en griller une sur le trajet et Stupeflip Vite t'explose à la gueule comme une ejac faciale. Tu pourrais en jouir tellement t'as le barreau, et pas celui de l'avocat, j'te jure. D'un coup Paris te semble extraordinaire, t'en saluerais presque les mendiants sur le bas côté. Tu te sens un peu comme cette bande de Pékinois qu'ont quarante mille selfies d'eux même avec parfois un monument en fond. Tu pourrais chanter, putain, alors que tu sais pas aligner deux octaves sans te péter la trachée, bas les couilles, ta caboche elle bouge toute seule, ça te destresse la nuque et tu t'exclames à qui veut bien l'entendre. Tu passes pour un dingue, un autiste parce que tiens c'est à la mode en France, tout le monde il est autiste, mais quid parce que là tu passes un moment miracle. Le flow glisse en toi, creuse comme une pelleteuse, c'est con, ça sert à rien. Le sens tu t'en balances, tu ressens la haine, la colère, le délire, les sons s'enchaînent, t'en ris quand ça tape comme un sourd sur Mylene Farmer, ça fout l'feu, fait l'fou, ça t'handicape quand tu l'as pas. Alors maintenant venez à moi, métros bondés, barres qui glissent tellement elles sont huilées par tes mains, venez les RER et leurs pickpocket qui sont susceptibles d'agir dans ta rame ou ta gare, venez, regardez comme on est bien, mes gars. T'as des matins comme ça où tout va bien. Check the Crou motherfucker.
Je te quitte et te souhaite bien du courage pour ton avenir, Lapin.