"Résolument anti-beauté" reconnaîtra John Cale. Effectivement, le dernier album du Velvet avec l'intéressé est empreint de ses idées fantasques. L'atmosphère dégagée par un premier titre, assez pop, presque vendeur, ne trompera pas longtemps l'auditeur : la suite flirte gentiment sur la frontière de l'écoutable et franchit parfois le seuil de douleur. Et pourtant, le noise offre aussi quelques instants de grâce, de "chaleur blanche". (Entretemps, j'entre-entends.)
Difficile de ne pas voir une antinomie entre le son de l'album et la lumière blanche du titre, sauf à revenir au sens physique de la lumière blanche, à la décomposer en l'ensemble du spectre lumineux. Comme un faisceau lumineux dont on aurait éparpillé les rayons façon puzzle. Une formidable collision cosmique menée jusqu'à la dissonance sœur. Une lumière blanche malade, atteinte de démence. Malgré cela, à la fin du tunnel acoustique, je vois Miss Rayon.
Si certains emploient les ultrasons pour faire décamper les jeunes fêtards passablement éméchés, je pense que diffuser à sa fenêtre White Light/White Heat est une arme de défense beaucoup plus efficace contre de telles jeunes oreilles sensibles et trop sages. Puisqu'il faut le dire : l'album ne se saisit pas d'emblée et a même toutes les chances de révulser à la première écoute. On peut ensuite à bon droit arguer que l'art n'est pas immédiat et nécessite une éducation, ou que l'écoute répétée de l'album vous a définitivement abruti.