Comment concilier deux cavaliers avec une histoire de bateaux ?
Voilà un peu la question que Cauvin a dû se poser lorsqu’un beau matin, et visiblement pas bien réveillé, il commence à griffonner l’intrigue des Bleus de la Marine. Pour cette septième aventure, le scénariste a eu un coup de génie : les Tuniques Bleues gagneraient en profondeur si on y injectait un peu d’événements historiques ! Cauvin ouvre un bouquin d’histoire, et il jette son dévolu sur les navires cuirassés et les premiers sous-marins imaginé durant la guerre de Sécession. Seul problème : aux dernières nouvelles, Chesterfield et Blutch servent dans ... la cavalerie, pas sur un bateau !
Qu’à cela ne tienne : Cauvin va leur faire subir un aller-retour Cavalerie – Marine – Cavalerie en une quarantaine de pages. Mais comme la Marine est un corps d’armée peu développé alors, et probablement pas la destination logique de cavaliers mutés, il faut justifier qu’ils ne rejoignent aucune autre fonction sur la terre ferme : ni infanterie, ni artillerie, ni infirmerie. Commence le running gag le plus long, le plus prévisible, et peut-être le plus poussif de la saga ... où Cauvin tente de justifier ces mutations en série sous couvert d’humour pas bien fouillé. Certainement pas les meilleures pages de la série ...
Une fois passée cette interminable introduction, on se retrouve avec plaisir immergé dans un univers atypique pour les Tuniques Bleues : la marine, les combats navals, et la course à la technique entre Nord et Sud pour dominer les mers. L’occasion pour Lambil, qui a trouvé son style de croisière, de signer quelques belles demi-pages sur les canonnades meurtrières d’un navire à l’autre. Dommage que nos Tuniques Bleues aient presque disparu de toutes ces vignettes, puisque deux individus seuls sont logiquement réduits à l’impuissance dans des combats de cette ampleur.
Les Bleus de la Marine n’est certainement pas un album inoubliable, mais il montre la maturation de Cauvin : celui-ci a compris que l’humour n’est pas un ressort suffisant pour porter toute une série. Les Tuniques Bleues devront de plus en plus se confronter à des péripéties tirées de l’Histoire, sous peine de s’essouffler ! Bref, Cauvin tient le concept, reste à savoir le mettre en application.