"Sur une île qui n'existe pas, tout peut exister."
On m'en avait vanté les mérites et par un habile chantage, j'ai réussi à m'y mettre, découvrant par là un univers quand même assez déjanté.
Philémon, donc, tombe par hasard dans un puits qui l'entraine sur une île fort cocasse au niveau de la faune et de la flore locales. Là, il y rencontre Barthélemy, puisatier de son état, qui lui même a chuté dans le puits, mais quarante ans auparavant...
J'avoue avoir eu des doutes quant au potentiel fantastique et délirant que l'on peut faire passer par une BD. Or, Fred parvient à bien installer un monde absurde, où Philémon devient son Alice tombée dans un pays des merveilles rocambolesque. La plongée du héros dans le puits est somptueuse, avec notamment une magnifique double-page où Philémon nage aux côtés d'un requin. Je fus aussi agréablement surpris par l'imaginaire de Fred. M'étant mis en tête depuis mal de temps que les BD franco-belges ont un temps de retard niveau imaginaire (en même temps, je dis ça en pur novice plein de préjugés dessus...), l'univers de l'île du A m'a bien remis à ma place. Les arbres à horloge ou à bouteilles sont bien délirants, de même que Vendredi, le centaure qui a ses jours de prédilection.
Mon vrai coup de cœur outre ce bestiaire fabuleux, c'est toute la symbolique que l'auteur parvient à installer autour de cette île, qui devrait se situer à l'endroit exact du "A" du mot "Atlantique" (le premier, précision indispensable) du nom "Océan Atlantique". La petite expédition de Philémon et Barthélemy sur les autres îles est elle aussi enivrante, surtout quand elle se fait à bord d'une caravelle mise en bouteille. La visite du second "A" est assez rapide mais clôt de façon surprenante cette incursion de Philémon dans ce monde du puits...
Mes vieux démons de pas-adepte-plus-que-ça de la BD me dépriment un peu quant au personnage de Philémon, que je trouve un peu trop naïf, sympathique mais sans plus. Peut-être que dans ses futures aventures gagnera-t-il en profondeur à mes yeux, le constat étant qu'il apparait comme un poil trop transparent dans un monde aussi fantastique que celui de Fred. Affaire à suivre donc.
Et les deux petites histoires qui complètent le tome sont sympathiques aussi. De même que la page d'introduction au NAUFRAGE DU A, où un hérisson nous narre ce qui va suivre au fil des pages qui vont se tourner, se faisant d'ailleurs remettre à sa place par l'auteur. Première page et déjà un sourire aux lèvres, ça commence bien, en attendant de lire les tomes suivants !