Tout de suite, j'ai été happé. J'ai été suspendu aux lèvres des patients pour savoir où menait leur histoire, qui a parfois bien du mal à sortir. J'ai voulu comprendre ce qui se cachait derrière chaque regard des juges, malgré la barrière volontaire qu'instaure le jargon médico-légal. Le monsieur est évidemment très bon dans cet exercite et je suis plutôt client à la base, mais c'était pourtant pas gagné.
Faut être honnête, le film ne s'annonce pas vraiment comme un grand thriller La majorité du film se concentre sur une formalité administrative où tout est plié d'avance : la décision par le juge de prolonger l'hospitalisation. Les certificats donnent déjà la réponse, l'avocat vérifie simplement qu'il n'y a pas d'irrégularités et que le patient est bien entendu. Patients qui, une fois sur deux, ne sont malheursement pas en état de pleinement comprendre ce que le juge leur raconte…Les quelques minutes d'entretien n'ont en soi aucun intérêt juridique, ni administratif.
Alors pourquoi ai-je été autant happé par une formalité administrative à tendance simulacre ? Parce ces quelques minutes d'entretiens sont absolument essentielles. Il y a une sorte d'evidence devant la charge émotionnelle des échanges, devant l'effort (surhumain parfois) des patients pour être aussi clair que possible devant les juges, devant les regards des juges. Aucun de ces entretiens n'est une formalité, ce sont de vraies grandes scènes de cinéma !
Le reste de la vie est à l'hopitâl est très bien suggéré par quelques plans sur les cours, les couloirs et les lits—un procédé pudique, que j'avais déjà beaucoup apprécié chez Mathieu Pernot. C'est largement suffisant.
On doit pouvoir faire des tas d'analyses savantes sur le reflet de la société, l'(in)humanité des traitements, le rôle de la justice, la condition humaine, les droits de l'homme bla bla bla… Je m'en fous un peu à vrai dire. L'essentiel, c'est d'écouter ces personnes dont on ignore tout, hors du cadre médical. Ça n'avait rien d'évident, mais c'est extrêmement bien senti de choisir ce moment précis du passage devant le juge. C'est une démarche qui prolonge largement l'effort fait pour donner un peu de temps de paroles à ces patients. Et ça fait un film indispensable !