12h08 à l'est de Bucarest par Clacadou
Voilà une excellente comédie pleine de dérision qui nous vient de Roumanie, un pays qui recèle bien des talents.
A la veille du 16e anniversaire de la révolution roumaine, un journaliste, à l'aide de deux invités, organise une émission télévisée spéciale pour répondre à une question cruciale : leur petite ville a-t-elle participé à la révolution ?
Dans sa première partie, le film nous fait découvrir les trois personnages, à quelques heures de l'émission : le journaliste, un professeur alcoolique, criblé de dettes et un papi débonnaire qui arrondit ses fins de mois en se déguisant en père noël.
Avec un dispositif minimaliste (caméra fixe, plans longs), le réalisateur nous montre une Roumanie morne et aborde sans artifices des sujets de société tel que la précarité, l'alcoolisme, le désœuvrement de la jeunesse... Les personnages sont décrits sans effets, avec leurs défauts, mais toujours humainement.
Mais c'est dans sa deuxième partie que le film excelle. On y assiste donc à l'émission de télévision, un grand moment de cinéma.
Le journaliste, abusant de citations philosophiques, tente de retracer les évènements qui ont eu lieu le 22 décembre 1989 vers 12h. La question (dérisoire) est de savoir si la population est sortie dans la rue avant ou après 12h08, heure de la fuite de Ceausescu diffusée à la télévision nationale.
Et très vite l'émission devient incontrôlable, avec des spectateurs appelant pour traiter le premier invité, le professeur, d'alcoolique et de menteur tandis que le second invité, le papi débonnaire, fait des bateaux en papier à la chaîne. Ajoutez à cela des caméramans incompétents, un débat sans queue ni tête et on a là un grand moment d'humour absurde, où la gestuelle et les expressions des acteurs sont d'une rare justesse.
Au final le film, en plus de nous faire rire, pose la question du bilan de la révolution roumaine, une révolution dévoyée qui aura laissé le pays en pleine désillusion, incapable d'aller de l'avant.
Un film drôle et fataliste qui ne plaira pas à tout le monde, mais qui enthousiasmera les autres.