Mes souvenirs d'enfant n'ont pas pris une ride. A peine la pellicule lancée, alors que le rideau se lève, dans l'aube blême un trois mats à vapeur se dessine. Dans les remous des vagues, deux hublots blafards surgissent, tels le regard d'une bête de l'apocalypse fonçant vers sa proie. La charge terrible s'achève dans un éperonnage explosif...
Voilà, je suis à nouveau happé dans ce film, superproduction Disney particulièrement sombre pour ce studio, malgré les chansons de matelots et l'otarie géniale. C'est pourtant tout à fait Disney qui fait rêver les gosses avec ces superbes paysages sous marins qui défilent, ce dépaysement total.
Dans un style Steampunk consommé, les aventures à bord du Nautilus filent à toute vitesse. Si la tête d'affiche est officiellement un Kirk Douglas en matelot prisonnier en constante rébellion, c'est bien James Mason qui éclabousse de sa présence chaque scène, composant un capitaine Nemo qui fascine et révulse à la fois. Chacune de ses répliques est un coup de semonce d'un calme glaçant, chacun de ses regards est un avertissement. Même absent, son ombre est partout, dans chaque recoin du Nautilus. De fait, à peine la séance achevée, le spectateur ne saura toujours pas dans quel camp ranger ce personnage hors norme.
Les effets spéciaux ont forcément vieilli mais restent tout à fait impressionnants, que ce soit le calmar géant ou les prises de vues "sous-marines". Les décors restent superbes, le Nautilus est un vaisseau crédible et majestueux. La musique omniprésente ponctue parfaitement la narration, on n'a pas le temps de souffler que déjà l'aventure s'achève.
20,000 lieues sous les mers persiste sans mal à être un grand film, alliant le divertissement et la réflexion sur la puissance de la science, créatrice, destructive, jouet dangereux aux mains des hommes.
Les secrets du Nautilus mériteraient-ils aujourd'hui de remonter à la surface?