APRÈS SÉANCE
Nous n’étions pas préparés pour cela… Et pourtant, dès 2011 dans Thor, nous avions devant les yeux le (faux) gant de l’infinie au détour de l’assaut des géants de glace sur Asgard. Thor, malgré ses défauts et mon faible intérêt pour ce film, avait été l’élément projetant le MCU dans une nouvelle dimension. Avant cela, L’incroyable Hulk et Iron man 1 et 2 n’avaient proposé que des histoires d’humains réglant des problèmes d’humains. Nous prenions conscience avec Thor des enjeux cosmiques de cet univers, qui deviendra la plus longue° et la plus lucrative saga cinématographique. Évidemment, à dimension extraordinaire, menace extraordinaire. Et celle-ci fut incarnée un an plus tard dans Avengers par Thanos, le Titan fou. Six ans que ce bad guy de l’espace est teasé et aujourd’hui, il est là. Il est là, et ça va faire mal…
° Excepté la saga des James Bond avec 24 longs-métrages à ce jour, mais qui n’a pas le même degré de cohérence et de connexion que le MCU à mon sens.
[Début d’un paragraphe où je raconte un peu ma life, mais néanmoins intéressant]
Avant de commencer, je souhaite donner une petite grille de lecture : je suis un fan de l’univers Marvel et plus globalement des histoires de super-héros, des films d’aventures fantastiques et de science-fiction. Je suis fasciné par l’impact de ces hommes en collant sur notre culture. Leurs histoires sont (ou vont devenir), à mon sens, aussi importantes que peuvent l’être l’Iliade ou l’Odyssée. Ainsi aujourd’hui, la plupart des personnes savent autant que ce signifie « avoir un talon d’Achille » qu’« être sa kryptonite » (référence DC je sais). Pour autant, je ne suis pas un fanboy absolu vénérant aveuglement chacun des MCU movies. Sur les 18 réalisations du Marvel Cinematic Universe sorties avant Avengers : Infinity War, j’en ai globalement apprécié moins d’une dizaine et celles que j’ai profondément aimées se comptent sur les doigts d’une main : Black Panther (mon avis sur ce film), Doctor Strange, Les Gardiens de la galaxie, Iron Man et Avengers. La note attribuée à ce film (à l’heure où j’écris ces lignes, j’hésite encore entre 9 et 10) est donc parfaitement réfléchie.
[Fin du paragraphe où je raconte un peu ma life, mais néanmoins intéressant]
Avengers : Infinity War prend la suite directe de Thor : Ragnarok où nous avions laissé le peuple asgardien face à face avec le Sanctuaire II, éternel vaisseau du surpuissant Thanos. Pendant que les gardiens et Doctor Strange vaquaient à leurs occupations, les Avengers (extended version) se remettaient tout doucement des événements de Civil War, ne soupçonnant pas la menace pesant sur eux. En effet, Thanos est enfin prêt à mettre son plan à exécution : récupérer les six Pierres d'Infinité et les utiliser grâce au gant de l’infinie dans le but d’exterminer 50% de l’univers pour le bien de l’autre moitié. Voilà, nous y sommes, le point culminant du mont Marvel !
ATTENTION : Afin d’éviter d’avoir une page illisible totalement grisée, il est possible que je ne cache pas certains « spoils » que je considérerai mineurs. Bien évidemment, les informations les plus sensibles seront cachées.
SUR LE FOND : 10 étoiles
IN-CROY-ABLE. Nous sommes vraisemblablement face au film le plus audacieux du MCU. Sans entrer (pour le moment) dans le schéma narratif et le dénouement choisis par les frères Russo, l’intrigue d’A:IW est incroyable. L’histoire est hyper intéressante et réussi à être lisible malgré la brochette XXL de personnages et la flopée de lieux visités. Dès les premières secondes, les enjeux de ce film sont posés. Je n’ai pas vu un plantage de décor aussi rapide depuis bien longtemps (si nous ne considérons pas les 18 films précédents comme une introduction à A:IW, bien entendu).
Le film ouvre littéralement sur le peuple asgardien décimé, Heimdal en tête. J’ai tellement été capté à froid par ces premières secondes que je n’ai pas pris le temps de réellement prendre conscience de ce que cela impliquait : Valkyrie est morte. Korg est mort. KORG bordel ! Bref, tout le peuple asgardien est mort. Toute l’idée de Thor : Ragnarok, c’était de dire « Asgard n’est pas un lieu, Asgard est un peuple » et pendant tout ce film, l’objectif est de sauver ce peuple. Cette ambition est intégralement anéantie en 3 secondes par Thanos.
Une fois ce décor planté, la quête de Thanos est limpide et sa détermination visiblement sans limite. Après seulement trois scènes en 18 films, l’attente concernant Thanos était extrême et je trouve que les frères Russo ont vraiment réussi à répondre à cette attente d’entrée de jeu. Très clairement, le personnage principal de ce nouvel opus n’est ni Iron man, ni le Captain mais bel et bien le Titan fou ! Toute l’intrigue est fondée sur lui et les frères Russo ont réussi à donner beaucoup de profondeur à ce super vilain. On sort des méchants assoiffés de violence pensant à la conquête de l’univers le matin en se rasant. Thanos a un vrai dessein, et le défend avec ses valeurs. Cela fait presque naitre une sorte de respect envers ce personnage parce qu’il a un réel projet construit dans lequel il n’est pas le maitre absolu, mais plutôt un martyr, le seul ayant le courage de prendre ses responsabilités.
D’ailleurs, il va être le premier à devoir faire des sacrifices notamment pour obtenir la tant convoitée pierre de l’Âme… L’aspect mélodramatique suivant la mort de Gamora n’est pas hyper bien traité, on ne croit pas suffisamment à la petite larme sur la joue CGI de Thanos. Malgré tout, cette scène a deux intérêts : 1. Cela nous montre que Thanos s’inclut totalement dans son plan. Comme toute personne, il doit faire des concessions, des sacrifices. 2. C’est le retour de Red Skull bordel !
La première heure de film est un peu plus décousue que le reste parce que c’est le moment (tant attendu) où les héros des différents univers se rencontrent. Mais ce n’est pas pour autant que le rythme du film en prend un coup, cela reste assez dynamique. En réalité, c’est même très bien fait et en tant que spectateur, on a l’impression d’assister à la rencontre de deux meilleurs amis qu’on connait séparément et qui apprennent à se connaitre malgré leurs différences. Chaque héros arrive avec ses codes, son background et cela fait des étincelles. D’ailleurs, une bonne partie de l’humour du film est fondée là-dessus. Souvent une des critiques principales des films MCU, l’humour est présent dans A:IW mais efficace. Évidemment, Spiderman et les Gardiens (Star-Lord et Drax essentiellement) demeurent les enrailleurs du film lors des passages trop tragiques ou dramatiques, mais n’est-ce pas totalement cohérent avec leurs univers originels ?
Let's talk about this plan of yours. I think it's good, except it sucks.
Les Gardiens de la Galaxie sont d’ailleurs très présents à l’écran (présence justifiée en partie par le lien particulier qu’existe entre Gamora et Thanos), mais avec plus d’une trentaine de têtes à placer, dont certaines nouvelles, le traitement des personnages est naturellement assez inégal. Parmi les figures emblématiques du MCU, le grand perdant est Captain America qui brille par son absence relative. Concernant les nouvelles têtes qui avaient été annoncées, Ebony Maw est à mon sens le seul à sortir du lot au sein du Black Order. Son sérieux et sa sérénité le rendent encore plus menaçant, et l’accent irlandais de Tom Vaughan-Lawlor lui donne beaucoup de classe.
Tout l’inverse d’Eitri (Peter Dinklage) en somme.
Globalement, A:IW propose beaucoup de créativité. On voyage sur différentes planètes très sympas, les capacités de chaque héro sont développées et sont très bien associées durant tout le film. L’histoire avance, Thanos progresse petit à petit dans l’exécution de son plan et on se dit « Non, il ne va pas réussir quand même. Ils vont trouver une solution, un tour de passe-passe… ». Plus l’intrigue se déroule, et plus un sentiment de déception anticipée se crée parce qu’on s’attend à un deus ex machina de plus en plus bâclé au fil des minutes qui passent. Et en réalité, on sort complétement des fins classiques à la Avengers, il n’y a qu’à (ré)écouter l’Ending soundtrack pour le comprendre.
Tout se passe comme prévu et la fin laisse le spectateur cloué à son siège. Cette fin, cette fin de ouf ! Imaginez un Retour du Jedi où Luke, Leia et Han se font découpés en deux par Vador qui clôt le film en se posant pépouze sur son trône en profitant de la vue ? Pire que cela, imaginez que Luke, Leia et Han aient été développés au sein de 18 films auparavant ! Toute une génération aurait été traumatisé, et en réalité aucun réalisateur n’aurait osé terminer un film comme cela.
Les frères Russo qui sont loin d’être des réals parfaits, ont au moins le mérite d’avoir eu les boloballs de faire ça. C’est tellement inattendu, osé, perturbant par rapport aux structures narratives que nous avons l’habitude de voir au cinéma. C’est très bien écrit, à une petite exception près : visiblement, Thanos et le Black Order n’ont pas de radar à Dragon Balls pour les pierres de l’infinie (un radar à pierres de l’infinie donc). Leur seul moyen de connaitre l’emplacement des pierres est la torture, ce qui fonctionne assez bien en fait. Mais comment le Black Order sait que Vision est à Édimbourg ? Et plus tard, pourquoi cinq vaisseaux de Thanos s’écrasent au Wakanda qui est censé être (de l’extérieur) une forêt vierge au sein du plus pauvre état du tiers-monde ? Je sais bien que Vision ne planque pas très bien sa gemme de l’Esprit mais quand même…
SUR LA FORME : 8,5 étoiles
Marquant les 10 ans du MCU (depuis Iron man en 2008), Avengers : Infinity War met le paquet avec un budget de plus de 300 millions de dollars le plaçant directement en tête du classement des films les plus chers de l’histoire. Le budget du vrai faux diptyque (avec Avengers 4) devrait même dépasser le milliard ! Pour rester sur les records, A:IW est également le film le plus long du MCU avec 2h36 au compteur. Malgré tout, le rythme est soutenu et ne laisse pas le temps au spectateur de regarder sa montre. Plusieurs actions se coupent, se superposent et s’interceptent, ce qui permet de ne pas avoir de creux dans l’intrigue. Évidemment, cela crée aussi l’inconvénient de retrouver certain héro après plus de 20, 30 voire 40 minutes d’absence à l’écran.
Comme dans leurs précédents opus du MCU, les frères Russo se limitent à filmer ce qu’il faut montrer, ni plus ni moins. Aucune fioriture, tous les plans ne sont présents que pour guider le spectateur : on filme les dialogues en champ - contrechamp, on filme l’action en train de se dérouler etc. Alors c’est bien fait, nous ne pouvons pas leur retirer ça. Et puis dans le Marvel où nous sommes censés entrer dans les derniers retranchements des personnages, cela a le mérite de créer une certaine proximité. Mais c’est tellement dommage parce que les environnements dans lesquels évoluent les personnages ne sont finalement que des arrière-plans.
Il y a pourtant beaucoup de créativité sur les environnements, on voyage beaucoup dans A:IW : la forge des nains Nidavellir, Knowhere le repère du Collectionneur, Titan la lune dévastée de Saturne... Et puis, on découvre aussi Vormir, une planète aquatique qui renferme de nombreux secrets et qui est probablement l’environnement le plus intéressant du film. La photographie est vraiment soignée, c’est dommage que toute cette richesse ne soit pas plus exploitée.
Surtout que le climax se passe dans le lieu le plus osef et le plus random possible. Cette jolie plaine wakandienne permet toutefois de livrer une bataille épique digne d’un Seigneur des anneaux où les hordes d’Outriders font écho aux Chitauris d’Avengers ou aux Androïdes d’Avengers 2 : l’ère d’Ultron.
Today we don't fight for any life... We fight for all of them.
La BO n’est certes pas la plus marquante mais les thèmes traditionnels des Avengers sont bien mêlés à des musiques originales beaucoup plus sombres collant parfaitement avec l’ambiance générale du film. L’heure est grave, nous le comprenons dès les premiers instants et la fin du film nous le rappelle. Pendant plus de 150 minutes, nos héros prennent des claques et nous avec. Alors au générique final, on aura probablement tous la même question : c’est quoi la suite ?
Avengers : Infinity War a d’abord été annoncé comme un film en deux parties avant que les frères Russo expliquent qu’Avengers 4 serait un long-métrage à part entière. En considérant A:IW comme une première partie, on comprend aisément que des solutions vont être trouvées pour arranger certains soucis.
Je parle évidemment du lourd tribut payé par les Avengers, notamment Parker, Strange, T’Challa et les Gardiens dont les suites ont déjà été annoncées dans la phase IV du MCU.
J’espère simplement que les solutions retenues resteront surprenantes. Vu la scène post-générique (qui se mérite, jamais vu un générique aussi long…), Captain Marvel nous offrira peut-être en mars prochain, des premiers éléments de réponse.
Bonus acteur : NON
Malus acteur : NON
NOTE TOTALE : 9,5 étoiles