On poursuit le chemin des thrillers de Pakula dans les 70’s. On est une dizaine d’années après l’assassinat de Kennedy. On est en plein Watergate. Le mouvement Hippie est mort de sa belle mort. Tout ça n’a qu’un rapport lointain avec le film ? Et pourtant…
Alors que le fringant candidat démocrate est en campagne présidentielle, il se fait assassiner par un homme qui meurt au moment de son interpellation. Lee Carter, journaliste témoin du meurtre, est persuadée que le tueur n’a pas agi seul, contrairement à ce que dit la version officielle. Son pote Joe, impétueux reporter, va reprendre son enquête.
Tendu, ça l’est du début à la fin. Dans la lignée des préoccupations de son époque, Pakula signe un thriller bourré de sous-entendus et plutôt pessimiste. Ainsi, cette Amérique-là, à peine fictive, est aux prises avec une violence politique sourde qui paraît bien loin d’une population qu’on ne voit jamais dans le film. C’est un truc des hautes sphères et l’on ne sait jamais pour quelles raisons les uns et autres canent. On ne sait pas si les motivations sont idéologiques, économiques, personnelles ? Ce qui se dessine, c’est plutôt l’idée d’une société secrète toute-puissante et protégée qui vit au-dessus de la loi. On le voit, on tient là un pur thriller paranoïaque. La mise en scène est nerveuse et inventive. Elle est soutenue par une partition musicale toujours à propos qui accentue la dramaturgie. Il y a de purs moments de tension. L’intrigue se déroule dans le plus complet brouillard, et c’est avec plaisir qu’on suit le héros dans ce labyrinthe. L’interprétation est tip top. Ça fait un moment que je n’avais pas vu Warren Beatty et sa belle gueule fait toujours des miracles. On saluera aussi les décors, spectaculaires et très bien utilisés. Et petite note pour finir, pour qui l’aurait vu, ça rappellera le I comme Icare de Verneuil, très bon aussi, dans son approche scientiste du profilage meurtrier.
En bref, c’est un thriller parfaitement maîtrisé tant dans la mise en scène que dans le développement de l’intrigue. Concis, efficace et inventif, il ne perd pas de temps mais s’en donne malgré tout. Il vous choppe et ne vous lâche pas. Tout à fait conseillé donc !
>>> La scène qu’on retiendra ? La scène de manipulation mentale qui pourra rappeler le conditionnement dans Orange Mécanique. Les images choisies sont confrontées selon plusieurs agencements successifs qui finissent par leur donner des sens différents. C’est à la fois drôle parce que stéréotypé et en même temps parfois pertinent. Une scène forte.