Rassemblant la fine fleur du cinéma italien de la fin des années 50-début des sixties, cette comédie satirique sociale cruelle n'omet jamais de dresser un constat amer de la misère et la désespérance sociétale d'une Italie du bas, celle des causes perdues d'avance, des petites magouilles entre amis et de la cruauté humaine.
Scénarisé par le fameux duo Age Scarpelli avec la collaboration de Mario Monicelli et du réalisateur lui-même, ce film qui n'ai pas le plus connu de ce qu'à pu donner le grande cinéma transalpin possède d'immenses atouts au-delà du sujet qu'il traite et de sa distribution de qualité.
Par certains aspects on flirte parfois avec la comédie croquignolesque façon Le Pigeon de Monicelli, avec cette petite bande de pieds nickelés, ici 4 détenus qui se font la malle. Par cette façon d'exposer la ritournelle des causes perdues d'avance et la labellisation de la loose magnifiquement illustrée par le personnage interprété par un Nino Manfredi de compétition, petite frappe sans envergure, qui se retrouve malgré lui à cavaler avec de vrais durs à cuire dont un Mario Adorf qui n'a pas son pareil pour interpréter les brutes épaisses. Partant de l'adage d'un proverbe chinois qui dit que Lorsque quelqu'un chevauche un tigre il est difficile de le désarçonner, notre anti-héros se retrouve malgré lui à nous rejouer la grande évasion avec une équipe de bras cassés roublards.
L'homme embrigadé dans des événements qui le dépasse, thème récurrent du cinéma italien est ici exposé sur le ton de la comédie, mais une comédie dans laquelle on ne rit que de l'absurde et où l'inacceptable, le viol, le crime, la rapine prennent des lors une tournure inattendue qui donne parfois un réel sentiment de malaise.
En terme de mise en scène pur le film de Luigi Comencini est somptueusement mis en image, avec un contraste de noir et de blanc qui accentue le sentiment de désespoir et de cause perdue qui jalonne l’œuvre du début à la fin. Le choix des lieux, la crasse, l'humidité et un soleil de plomb sont autant d'éléments implacables qui accompagnent nos personnages dans leur naufrage existentiel.
Servi par une distribution de tout premier choix,avec hormis Manfredi et Adorf, la présence d'un jeune Gian Maria Volonté et le français Raymond Bussières dans le rôle de la souris, le film n'en sort que grandi au-delà de la maîtrise formelle et visuelle de la réalisation de Comencini.
Jamais dépourvu d'un vrai regard interrogatif sur la société des hommes au-delà des clichés, dont elle use toujours magnifiquement, la comedia dell'arte est ici parfaitement illustrée.