Une respiration ouvre le film, une autre le referme.
Entre les deux, la course effrénée d'une mère célibataire en apnée, étouffée par les multiples existences qu'elle doit mener et (sup)porter seule.
Celle d'une femme de chambre de palace parisien à qui l'on donne trop de responsabilités et de tâches ingrates et qui rêve d'un emploi à la mesure de ses véritables compétences (ou pas) ; celle d'une travailleuse qui vit dans le Val-de-Marne, lointaine banlieue du sud-est devenue presque inaccessible lorsque les grèves et les révoltes sociales du pays paralysent les transports en commun ; celle d'une maman qui ne veut pas être absente pour ses enfants qui (la) réclament et qu'elle gâte comme elle peut, mais qui n'a pas le choix ; celle d'une femme qui ne peut pas compter sur son ex et qui ne sait plus séduire, quand elle ne doit pas seulement se protéger ; celle d'une postulante à une vie meilleure humiliée par une chasseuse de tête qui a le cynisme et l'ignorance de sa jeunesse confortable...
En empruntant au thriller le rythme haletant, la réalisation énervée, la B.O. palpitante et le crescendo d'une tension dramatique de plus en plus anxiogène et noire, et en s'appuyant évidemment sur l'énergie et l'interprétation de la toujours parfaite Laure Calamy, Eric Gravel signe un hommage impressionnant à ces femmes et ces hommes qui, chaque jour, se battent pour survivre.
Pour les leurs. Contre les autres.
Une demi-tonne de charge mentale à transbahuter à bout de bras que l'on n'a pas le droit de baisser.
A bout de souffle.