Abandonnant, le temps d’un film, la brutalité du monde des yakuzas, Kitano signe avec A Scene At The Sea, hiérarchiquement le 3ème film de sa filmographie, une œuvre tendre et contemplative qui sous ses apparences de romance édulcorée, parle d’espoir et de persévérance.
Mais il s’agit également d’une grande œuvre musicale aux accents lyriques élevée par l’extraordinaire partition de Joe Hisaishi, acolyte de Kitano, qui tout le long de sa filmographie accompagnera son œuvre jusqu’à en faire partie intégrante. Kitano /Hisaishi c’est comme Leone/Morricone ça forme un tout.
Des longs plans fixes sur des visages aux expressions mesurées, des scènes de tartuferies cocasses et souvent cruelles, des compositions de cadre où les personnages prennent vie dans leur plus stricte figuration, tout est là. Le style Kitano s’est mine de rien déjà imposé et ne cessera son déroulé jusqu’à l’apogée de sa carrière avec son chef d’œuvre de feu d’artifice intimisme… que sera Hana-Bi.
Sous ses faux airs de ne rien raconter, ou si peu, et d’abuser de sa façon de faire caractéristique du cinéma dit contemplatif, A Scene At The Sea est, si l’on veut bien s’y laisser prendre, une invitation à se laisser aller et d’être happé par l’émotion naturelle que fait naître cette sorte de théâtralité. Car tout le cinéma de Kitano est axé sur ce grand principe fondateur de l’art nippon.
Mais au-delà de l’aspect purement artistique et de la composition musicale l’accompagnant, on ne doit pas obnubiler sa façon de parler d’une multitude de sujets sociétaux. C’est donc un cinéma purement conscient de l’aspect humain.
L’absence de dialogues, si ce ne sont quelques échanges sans importance, met en évidence la volonté de Kitano de faire place à la mélodie des vagues dont les regards pleins d’envie des principaux protagonistes sont une invitation à cette ode poétique de ce champs des possibles.