Alamo est un film que je guettais du coin de l’œil depuis des années ; je savais que c'était un film au tournage compliqué, dont la première version, plus longue de 35 minutes, n'est pas réapparue depuis son avant-première en 1960, et naïvement, j'attendais ce montage-ci pour me faire mon opinion. Sauf que près de 60 ans plus tard, pas de director's cut à l'horizon, et donc, je me suis plongé dans le film qu'on connait, qui dure 2h47, et qui est déjà en soi un sacré morceau de cinéma.
Le film reprend un épisode célèbre de la guerre d'indépendance qui est la défense du fort Alamo par 185 civils américains, avec comme chefs Davy Crockett et Jim Bowie, contre l'arrivée de milliers de soldats de soldats de l'armée mexicaine. C'était un point stratégique essentiel dans la conquête du territoire, et ce bastion se prépare en attendant les renforts texans.
Il en résulte un film d'une grande force, auquel John Wayne y apporte une figure mythologique magnifique, mais, on aurait pu le craindre en tant que réalisateur et producteur, il ne tire pas la couverture à lui, et laisse la part belle à Richard Widmark, qui incarne Jim Bowie et à Laurence Harvey, jouant le colonel William Travis.
Pour son premier film en tant que réalisateur, Wayne fait déjà montre d'une grande maitrise, sans doute fortement inspirée par John Ford, dont ce dernier viendra d'ailleurs tourner quelques plans durant l'assaut final. On y retrouve cet Americana, les duels dans les saloons, et bien entendu, la représentation de la virilité chère au Duke, que je trouve excellent, bien qu'il a l'air d'avoir beaucoup maigri ; est-ce pour le rôle ou le stress d'une telle production ?
N'oublions la musique de Dimitri Tiomkin, héroïque à souhait, et qui a beaucoup apporté à la reconnaissance du film. Quant à la réalité décrite dans l'histoire, Wayne et son scénariste ne s'en accommodent guère, car ils y voient sans doute un portrait courageux des résistants texans ; après tout, peu importe si la réalité fut plus ambiguë, pourvu que le cinéma lui fasse un bel enfant.
Mal m'en a pris de mettre autant de temps à voir ce film de siège, que j'ai trouvé formidable du début à la fin. D'ailleurs, ce n'est pas un hasard si les 2h47 sont allés à la vitesse d'un rêve, avec cette dernière partie absolument magnifique rendant hommage à l’héroïsme d'hommes et de femmes résolus à se sacrifier pour une cause juste, ce qui rend Alamo universel.
Il est d'ailleurs touchant de constater que le film a été une réussite mitigée, commercialement parlant, malgré les moyens colossaux souvent mis en place grâce au propre argent de Wayne, lequel ira jusqu'à hypothéquer ses biens pour terminer le tournage. Le Duke a laissé sans doute de ses plumes, sa santé sans doute, mais pour quelque chose de magnifique, qui est une date dans l'histoire du Western.