« My mommy always said there were no monsters. But there are. » ELLEN RIPLEY

Si Alien 3 a été un succès au box-office, le film de David Fincher n’a hélas pas fait l’unanimité auprès des spectateurs en se rendant plus célèbre pour ses problèmes en coulisses et sa gestation cauchemardesque que pour ses qualités cinématographiques. La franchise n’est alors plus tout à fait une priorité pour la 20th Century Fox, qui préfère se consacrer à d’autres projets. 

Toutefois, l’intervention de Jorge Saralegui, vice-président de la branche production de la Fox, change la donne. Grand fan de la saga, il souhaite la relancer malgré les retours mitigés et le succès modeste du volet précédent. Impressionnés par le travail de scénariste de Joss Whedon, les producteurs font alors appel à lui pour l’écriture de ce quatrième chapitre.

À l’origine, le scénario de Whedon devait se concentrer sur Newt, la petite fille pourtant morte dans le troisième opus. L'enfant est alors ressuscitée par la compagnie Weyland-Yutani, qui souhaite utiliser son instinct de survie et ses capacités surhumaines pour traquer les xenomorphes. De son côté, la Fox désire faire de ce quatrième volet un épisode de transition avant un dernier film, qui se déroulerait sur la planète Terre.

Jorge Saralegui demande ainsi à Joss Whedon de reprendre l’écriture et de remplacer Newt par Ripley, une tâche que le scénariste trouvera extrêmement difficile. Whedon cherche en effet un moyen crédible de faire revenir l’héroïne. L’idée du clonage lui est alors soufflée par David Giler et Walter Hill, également attachés au projet via leur société Brandywine Productions. Ces derniers sont pourtant fermement opposés à la mise en chantier du quatrième opus. Ils estiment que ce nouvel épisode ne fera qu’enterrer la saga.

Les dirigeants de la 20th Century Fox s'emploient, quant à eux, à convaincre par tous les moyens Sigourney Weaver de rejoindre le projet. Mais l’actrice avait tourné la page et refusait que Ripley devienne un personnage malléable, que les producteurs feraient revenir comme bon leur semble.

Fort heureusement, Sigourney Weaver finit par changer d’avis après avoir reçu le scénario de Joss Whedon. Admiratrice de son travail, elle y voit l’occasion d’interpréter une autre facette de son personnage, moins humaine et plus animale. Elle accepte la proposition en échange d’un énorme salaire et suggère le sort final de son personnage. En échange, elle devient co-productrice ce qui lui permet de proposer quelques idées pour enrichir l’intrigue.

Les producteurs se mettent à la recherche d’un réalisateur, qui puisse rivaliser avec le génie de Ridley Scott, James Cameron ou David Fincher. Danny Boyle est le premier choix du studio. Malheureusement, il refusera le poste, estimant ne pas être de taille pour une production à si gros budget. Peter Jackson est ensuite approché, mais repousse la proposition, ne voyant pas d’intérêt à ce nouveau chapitre. La Fox s’intéresse également à Paul W.S. Anderson qui ne peut pas répondre positivement a cause de son calendrier. Enfin, pendant un temps, Bryan Singer est envisagé, mais ne donnera pas suite.

Finalement, la 20th Century Fox et Brandywine Productions contactent Jean-Pierre Jeunet. Le réalisateur et scénariste français ne se sent pas prêt à réaliser un film de cette ampleur. Par ailleurs, il considère que donner suite à la conclusion du troisième opus est une très mauvaise idée. Cependant, il accepte de rencontrer les producteurs et se rend à Los Angeles où il fait la connaissance de Sigourney Weaver. Suite aux encouragements des dirigeants et de l’actrice principale, Jeunet finit par accepter bien qu’il trouve le scénario de Joss Whedon très moyen.

Souhaitant ne pas reproduire les mêmes erreurs commise avec David Fincher, la Fox accorde quelques libertés à Jean-Pierre Jeunet. Il s’entoure donc du spécialiste français des effets spéciaux Pitof et le chef opérateur Darius Khondji, qui ont travaillé avec lui sur La Cité des Enfants Perdus. Il fait également appel à Marc Caro, directeur artistique et co-auteur de Delicatessen, qui participera au développement du film avant de quitter le navire au début des prises de vue.

Pour le casting, Sigourney Weaver est accompagnée de Ron Perlman et Dominique Pinon, acteurs fétiches de Jean-Pierre Jeunet.

S’ajoutent également Winona Ryder, Gary Dourdan, Michael Wincott et Kim Flowers dans les rôles de mercenaire.

Enfin, il faut ajouter les docteur de la base : J.E. Freeman et Brad Dourif.

Que des gueules cassées du cinéma.

Alien : Resurrection sort donc en 1997.

Quatrième et dernier volet de la saga d’origine,le film est également le plus détesté de tous. Il n’en demeure pas moins un opus tout à fait honorable. Deux cents ans sont donc passés depuis la mort de l’officier Ripley. Son corps a toutefois été récupéré par une équipe de généticiens qui décident pas moins que de la cloner espérant ainsi récupérer la créature qu'elle portait en elle sur la planète Fiorina 161. Après plusieurs tentatives infructueuses, l’expérience réussit. La Reine Alien est prélevée et les scientifiques laissent la vie sauve à la nouvelle Ripley.

Ce serait une erreur de réduire le film à son postulat de départ plutôt classique. Nageant entre action décomplexée, horreur graphique et excentricité visuelle, la recette est somme toute intéressante. À la croisée de deux univers, ceux de Joss Whedon d’une part et de Jean-Pierre Jeunet de l’autre, il offre une aventure à part à l’esthétique soignée et à l’humour décalé, jamais ressenti dans la franchise. Avec le français Jean-Pierre Jeunet aux commandes, ce nouvel opus est prenant et visuellement impressionnant. Décors somptueux, photographie magnifique, mouvements de caméra millimétrés, ce quatrième film est certainement le plus beau de la saga en terme de mise en scène et d’effets spéciaux. En apportant son style grotesque, son esthétique jaunâtre et son humour noir, le réalisateur ne déroge ainsi pas à la tradition de la franchise, à savoir réinterpréter la mythologie à sa manière.

Le film est en totale rupture avec l’essentiel de ce qui a fait le succès du premier volet. Le film se veut drôle et plus léger, ne serait-ce que pour ses dialogues consistant en grande partie en une avalanche de punchlines dignes de films d’action. Les membres du commando en sont l’exemple le plus flagrant, chaque personnage étant plus ou moins une caricature. Les vannes machistes entre Ripley et l’équipe de mercenaires font souvent mouche et participent au côté décomplexé du récit. La parodie n’est donc jamais loin.

Ellen Ripley n’est plus celle que le spectateur a connu jusqu’à présent. Mi-humaine, mi-alien, il ne s’agit plus du personnage rencontrée dans le premier opus, mais d’un clone qui s’interroge sur sa propre existence et cherche un sens à sa vie. Sarcastique, désespérée au fil des minutes, elle réalise progressivement qu’elle n’a plus rien à perdre. Pour autant, elle sait se défendre et n’hésite pas à répondre aux provocations, ni à affronter les monstres. Bien qu’elle reste fidèle à l’héroïne d’origine, cette nouvelle Ripley est à des années lumières de son modèle. Plus sauvage et meurtrière, c’est une femme animale et sensuelle à laquelle le public est confronté, attribuant une nouvelle dimension à son personnage. L’actrice apporte une nouvelle facette à Ripley et prend du plaisir à la réinterpréter, entre innocence et prédatrice redoutable.

Considéré comme le film de trop, il ne met pourtant pas de côté les épisodes précédents et sème même quelques petits clins d’oeil bienvenus. Ainsi, les thématiques de la reproduction, la famille et la maternité, chers à la franchise, font leur retour et rejoignent parfaitement les autres opus, tel la fin d’un cycle. Ripley perd sa fille biologique, puis sa fille d’adoption, Newt, et devient mère porteuse d’un être qu’elle ne veut pas mettre au monde. Elle est donc ramenée à la vie pour donner naissance à sa monstrueuse progéniture et fera face à un hybride, fruit de la fécondation entre humain et xenomorphe. Dans les dernières minutes, elle doit choisir entre la survie de l’espèce humaine à laquelle elle n’appartient plus et satisfaire son propre intérêt. Un dilemme d’autant plus crucial puisqu’il oppose deux espèces dangereuses pour elles-mêmes et leur environnement. La logique de la famille trouve ici sa conclusion d’une manière monstrueuse.

Inattendu, déconcertant, Alien : Resurrection n’est clairement pas le meilleur opus de la saga. Si il constitue un élément étrange dans la saga, il mérite tout de même sa place parmi les autres volets. Tout en restant dans la continuité de la franchise, il offre à cette dernière une nouvelle jeunesse en l’enrichissant de thèmes forts et innovants. Film de science-fiction décomplexé, mélangeant subtilement second degré et horreur graphique, porté par des acteurs a gueules, le film livre une aventure plutôt originale et renouvelle intelligemment le mythe du xenomorphe.

StevenBen
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le 19 août 2024

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Steven Benard

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