Après une conclusion satisfaisante de l'Histoire d'Helen Ripley la Fox a envie de remettre le couvert. Sigourney Weawer se laisse tenter par le projet ne voulant pas voir la consécration d'un autre, Alien vs Predator. C'est Jean-Pierre Jeunet le futur 🇫🇷 papa de Amélie Poulin, déjà réalisateur de Delicatessen (1992) et La Cité des enfants perdus (1995) qui est choisi pour sa patte esthétique déjà très prononcée. Jaunet d'abord surpris de l’intérêt que lui porte le studio pour réaliser un tel produit hollywoodien a toujours déclaré qu'il pense qu'un 4e volet est inutile après Alien 3. C'est sans aucun doute l'opportunité d'être aux commandes d'un blockbuster budgété à 70 millions de dollars (l'opus le plus cher de la saga à cette époque) qui motiva la réalisateur français à s'embarquer dans l'aventure. Sur un scénario de Joss Whedon (créateur de Buffy contre les vampires) assez classique pour la saga Jean-Pierre Jeunet va s'en donner à cœur joie pour mettre en scène cette histoire. Ici les Aliens feront la Révolution et une ambiance d'humour noir. Le réalisateur s'entoure à la production du spécialiste français des effets spéciaux Pitof et le chef opérateur Darius Khondji.
Il y a déjà plus de folie (design) et d'inventivité dans la mise en scène que dans Alien 3. En effet Jeunet a inclus au moins une idée par plan parfois "grangignolesque" (le film est le plus gore de toute la franchise et dans le même temps le plus léger). Les effets visuels sont biens supérieurs (sur les monstres, maquettes et autres mate painting). Les animatroniques sont excellents (les xénomorphes, la Reine et le Nouveau Né). Le rythme est super bien dosé car on ne s'ennuie pas une seule seconde. L’esthétique de Jaunet se ressent avec des plans d'images déformées, les zoom brusques sur les personnages, sa photographie jaunie et sa galerie de freaks (avec notamment la bande de pirates de l'espace dont 2 d'entre eux interprétés par des familiers du réalisateur : Ron Perlman et Dominique Pinon (le studio et Wawer ont particulièrement insisté pour avoir ce dernier, l'actrice ayant supplié à genou l'acteur au téléphone abandonner sa pièce de théâtre pour aller tourner film). La Fox et Weawer ont par ailleurs Mêmes les autres membres d'équipages du vaisseau ont des geules (Dan Hedaya, Brad Dourif, J. E. Freeman et Michael Wincott). On retient surtout les performances de Sigourney Weawer (plus sexy et badass que jamais ici) puis Winona Ryder (un personnage avec beaucoup d'humanité, là où les autres personnages en semble dépourvus à cause de leurs égos respectifs). J'ajouterais que les dialogues entres les deux actrices sont délicieux. Cette Ripley a "quelque chose du prédateur", tellement sa façon de s'exprimer est froid voire animal quand ce n'est pas pour faire du sarcasme ou toucher à une corde sensible lorsqu'elle se réhumanise. La superbe musique de John Frizzell est un atout pour cette ambiance d'étrangeté qui transpire à chaque image.
Cet opus est une véritable anomalie car dans ce dernier beaucoup de rôles s'inversent :
L'ordinateur du vaisseau s'appelle Père (et non plus Maman comme dans le Nostromo). L'androïde est de sexe féminin ("programmée pour être conne", c'est-à-dire sauver les Humains) puis n'assume pas sa nature synthétique, différence qui fait écho à la nature de Ripley. En effet dans cet opus Ripley qui est "étrangère" (alien) à sa tour (étant une clone hybridée avec les facultés propres au monstre mais qui s'humanise). C'est même la Reine qui finit par porter une progéniture avec une utérus héritée de sa mère (Ripley) et non plus Ripley.
Toute cette réussite a été permise grâce à Sigourney Weawer qui, en tant que coproductrice du film forte de son cachet gonflé (11 millions de dollars), a soutenu le réalisateur dans ses choix et leurs directions face aux volontés de la Fox (ayant sabré le travail de Fincher sur Alien 3).
En résumé, l'étrangeté typique du réalisateur français fait tout le charme de cet opus. Ce dernier est un bon ajout à la trilogie d'autant qui a le mérite de proposer autre chose.