L'élection de Donald Trump a fait couler beaucoup d'encre et suscité des questionnements existentiels chez les "faiseurs d'opinion" : comment ces gens osent-ils mal voter alors qu'on leur a administré une dose quotidienne de vérité officielle pendant des années ?
Le documentaire de Claus Drexel a une démarche assez différente et largement plus intéressante : donner la parole à ces gens dans un petit village de l'Arizona afin de comprendre leur logique. Car dans cette communauté, il existe une logique interne qui a sa cohérence avec suffisamment de vérité dedans pour qu'elle paraisse plausible à ses membres, même si elle peut paraître folle et irrationnelle vue de l'extérieur, surtout de ce côté de l'Atlantique.
En 1H20, le film rend particulièrement bien compte du point de vue des habitants de la ville dans toute sa complexité et ses paradoxes. Une fois qu'on accepte d'écouter ce point de vue, on passe franchement un bon moment dans cet endroit, on y entend tantôt des remarques de "bon sens", tantôt des opinions tellement over-the-top qu'elles en deviennent hilarantes. Mais on ne sent jamais que les propos tenus sont ceux d'un idéologue ou d'un militant, simplement de gens normaux dont seul le vécu commande l'avis, et on finit par s'y attacher un minimum grâce notamment à l’honnêteté du dispositif, bien servi par la justesse des cadrages et la fluidité du montage.
Au final on se réjouit d'avoir vu pendant cette heure et demi cette sorte de Twin Peaks revu et corrigé par Clint Eastwood, avec ses personnages que même les frères Coen n'auraient jamais pu imaginer (si si à ce point) et leurs répliques déjà cultes pour moi , malgré la mélancolie et l’inquiétude sous-jacentes d'un réalisateur attaché à ce pays. On peut tout de même se consoler en se rappelant que le trumpisme n'a pas totalement eu raison du bon sens et de l'humour de certains d'entre eux ...
" - I think we should at least give him a shot
- Yeah, right in the head "