Années 80.Anna est une jeune moscovite à la vie pas facile.Miséreuse et vivant avec un petit truand déjanté,elle voit l'occasion de s'en sortir quand le KGB la recrute.Sous couverture d'un emploi de mannequin vedette,elle devient une véritable machine à tuer,mais la CIA la démasque et l'oblige à devenir un agent double.Luc Besson,ci-devant réalisateur,producteur et scénariste du film,retrouve un peu de sa superbe d'antan avec ce thriller paranoïaque qui n'est rien d'autre qu'un remake de son "Nikita" trente ans après.Evidemment du temps a passé et c'est forcément différent dans la manière de traiter l'histoire."Nikita" c'était Gaumont,donc une oeuvre franco-française avec ce que ça comporte d'âpreté et de réalisme."Anna" c'est EuropaCorp,donc plus de moyens,plus de clinquant,plus de sophistication et un récit qui s'éloigne vite de la fracture socio-mentale pour ressembler à une jamesbonderie à visée internationale.Du coup c'est plus spectaculaire mais moins prenant,on pouvait s'attacher à Nikita,moins à Anna même si elles sont dans des galères similaires.Ceci dit Besson a plutôt la pêche en l'occurrence,ce qui ne lui arrive plus si souvent,et son film fonctionne aussi bien en terme d'action que d'espionnage.Beaucoup de bastons,de poursuites et de gunfights très bien shootés,de façon lisible, et imprégnés d'une ultra-violence sèche,le tout étant porté par une narration éclatée habile faite de retours en arrière réguliers qui éclairent les évènements et dévoilent les dessous d'un jeu de manipulations vicieux auquel participent tous les protagonistes,qu'il s'agisse des services russes et américains ou d'Anna elle-même,cette fille alliant à un physique de rêve une intelligence hors-norme qui lui permet d'être bien au-dessus du pion manipulable et corvéable à merci que les autres croient diriger à leur guise.Entre deux scènes de violence déchaînée le script nous balade de surprise en surprise pour aboutir à un excellent divertissement.Besson est entouré de son staff traditionnel,toujours au taquet.Thierry Arbogast signe une photo très propre et bien adaptée aux nombreux lieux visités qui présentent des luminosités différentes,et Eric Serra signe une musique mélodique et dynamique collant parfaitement aux séquences et aux changements de rythme.Quant au décorateur Hugues Tissandier,il confirme qu'on est vraiment chez Besson avec ces lofts impersonnels,ces couloirs d'hôtels inquiétants ou ces immeubles officiels froids où rôde la mort.La magnifique Sasha Luss est réellement un mannequin russe et,pour son premier rôle principal, fait le taf au-delà de ce qu'on pouvait espérer.Naturelle,cinégénique,à l'aise dans les scènes physiques,elle se révèle tout-à-fait crédible dans ce personnage improbable.Son premier contrat,avec le massacre dans le restaurant,est identique à celui d'Anne Parillaud autrefois et s'impose comme un modèle de boucherie chorégraphiée.Si dans "Nikita" Tchéky Karyo était le seul mentor de l'héroïne,il y en a ici deux pour le même prix et Luke Evans le soviet comme Cillian Murphy le yankee font preuve de présence et d'autorité dans des styles distincts.Le rôle de la vieille patronne rouée,jadis dévolu à Jeanne Moreau,échoit ici à une Helen Mirren plus en vue et épatante en carne absolue au fait de tous les coups fourrés.L'amoureux transi et naïf incarné par Jean-Hugues Anglade en 90 cède ici la place,signe des temps,à une amoureuse car Anna est bien sûr bisexuelle.Peu d'acteurs francophones au sein de ce casting essentiellement britannique,la plus connue étant Alison Wheeler qui fait l'effort de porter un nom anglais pour être raccord avec le générique.