Tout cinéphile auto proclamé car il détient un compte Sens Critique se doit d’avoir une réponse à la question « c’est quoi ton film préféré ? ». Si le destinataire répond Interstellar, Fight Club ou Shutter Island, il vend la mèche… Il passe obligatoirement dans la case des faux sans personnalités qui viennent tout juste de s’intéresser au charme discret de la cinéphilie.
Il faut donc à ce compte SC un film préféré différent, un film qui lui donne du cachet et dont la plupart du grand public de son âge (26 ans lors de l’écriture) n’avait même pas idée de l’existence. Un film qui révèlerait une part de mystère et qui donnerait envie d'en savoir plus sur le personnage...
Ce film sera Annie Hall.
Quand je lance ma séance annuelle d’Annie Hall, un phénomène hors du temps opère.
Un monde nouveau s’ouvre, où la vie vaut d’être vécue pour toutes ces bonnes raisons :
Lancer Annie Hall, c’est y trouver l’un des couples les plus emblématiques du cinéma. Le film, qui est originellement écrit pour Diane Keaton, met en avant la complicité et l’alchimie qu’a pu avoir le couple Diane Keaton/Woody Allen mais aussi ses limites puisqu’ils se sont séparés quelques années avant le film. Ce couple, c’est ce qui fait la colonne vertébrale du film : on a envie d’y croire, on est complices de leur plus grand intimités et on partage leurs plus grands défauts.
Le charme de Diane Keaton porte le film tout du long en volant même la vedette à Allen dans son propre jardin. Son look deviendra d’ailleurs totalement culte, comme si toutes les étoiles étaient alignées pour faire de ce film un moment de grâce.
The horrible and the miserable.
Lancer Annie Hall, c’est y trouver l’équilibre parfait entre une noirceur et un pessimisme philosophique et des blagues à chaque coin de phrase. On lance le film pour y écouter la musique de ses dialogues à n’en plus finir. Des dialogues que l’on pourrait refaire à voix haute comme sa chanson préférées en karaoké, mais rien ne vaut l’original.
Critique des professeurs, le futur des camarades de classe, réflexions sur la mort, la queue au cinéma, tant de scènes vues des dizaines de fois mais qui résonnent si juste lorsqu’elles arrivent à mes oreilles.
Si vous n’aimez pas les dialogues à outrance, passez votre chemin et laissez-moi la part entière du gâteau. Aucun plaisir ne sera boudé en séance.
You know how you're always trying to get things to come out perfect in art because it's real difficult in life.
Lancer Annie Hall, c’est croire en la force du cinéma dans la vie de tous les jours.
Malgré tous les défauts des personnages et de leurs situations surlignés au stabilo jaune fluo de Woody, Annie Hall reste un film foncièrement optimiste. Prendre des décisions, les regretter, passer à autre chose tout en ayant foi en l’art, le bon sens et l’avenir. Allen essaie de rendre parfaites les choses qui paraissent difficiles dans la vie et ce film en est la preuve exacte.
Ce film résume l'absurdité de toutes nos activités, le cinéphile en premier. Pourquoi continuons-nous à croire aux autres ? Pourquoi passer des heures à se farcir des films de toutes sortes dont la plupart ne vous marqueront absolument pas ?
Because we need the eggs