Si le premier film Ant-Man de 2015 avait été un peu broyé par la grosse mécanique de Marvel suite à l’éviction d’Edgar Wright du projet, il n’en restait pas moins une étonnante petite réussite. Face à ses petits camarades costumés qui se prenaient (encore) trop au sérieux, Ant-Man était un petit outsider, le héros minuscule mais à ne pas sous-estimer. Il arrivait à donner du corps à son alter-ego dans le civil, le petit voyou au grand coeur Scott Lang, en réussissant à développer son passif mais aussi sa personnalité, attachante car maladroite. Le héros en devenir avait d’ailleurs les pieds sur terre, grâce à ses amis ou ses relations avec les membres de sa famille. Il allait d’ailleurs étoffer son cercle avec celui de la famille Pym, bien que cela se fasse au départ sur de mauvaises intentions, par la suite rattrapées.

Malgré une menace bien méchante, Ant-Man était l’un des films Marvel les plus en phase avec un certain quotidien, sans héros multimilliardaire, sans scientifique irradié, sans super-soldat décongelé, mais bien avec une petite frappe pas bien méchante mais bien en reconversion, à la personnalité taquine mais jamais condescante, et au coeur grand comme ça avec ses proches.

Une place de héros du quotidien qui comble alors un certain manque chez Marvel Studios, depuis rattrapé, l’absence de Spider-Man alors en contrat chez Sony. Un positionnement qui lui va bien et qui lui permettra d’obtenir un certain succès : le petit héros au grand coeur devient alors vite populaire, et Marvel le rattache alors à son grand plan d’ensemble pour ses films et lui offre rapidement une suite.

Ant-Man et la Guêpe n’arrive ainsi “que” trois ans après le précédent, mais intègre aussi les retombées de l’intégration du personnage dans Captain America: Civil War. Là où les films Marvel et leurs grands problèmes annoncés n’ont souvent que peu de conséquences d’un métrage à l’autre pour garder une certaine indépendance, la suite absorbe les évènements du film de Captain America, à tel point qu’il n’est pas inutile de le regarder pour suivre l’histoire d’Ant-Man.

Le film de 2018 continue même une autre piste, amorcée dans la fin de celui de 2015 : la recherche de la mère de Hope Pym et de la femme d’Hank Pym, piégée dans une dimension subatomique. Hope prend ainsi une nouvelle dimension, comme l’indique le titre, et Marvel amorce ainsi un véritable virage dans l’intégration de personnages féminins plus autonomes dans sa trame de fonds. La Guêpe n’est ainsi pas une subalterne d’Ant-Man, qui, ici subit des problèmes avec son costume pour mieux laisser la place à sa coéquipière. Contrairement à elle ou à Hank, déterminés et pas toujours de la manière la plus aimable, il reste un grand enfant qui a muri mais a toujours du mal à accepter toutes ses responsabilités.

Mais même si c’est un régal de revoir les personnalités bien définies de Scott, Hank ou Pym, toujours interprétés par les mêmes acteurs investis, Paul Rudd, Evangeline Lily et Michael Douglas, cette suite perd tout de même du charme de son premier épisode. Ceci parcequ’il étire une quête omniprésente mais toujours décalée par les nombreuses péripéties possibles, que ce soit à la recherche de solutions vaguement technophiles pour faire du secourisme entre les dimensions à un jeu du chat et de la souris entre l’équipe des fourmis, le FBI qui traque les Pym et surveille la probation de Scott (pas vraiment respectée mais contournée), un trafiquant de matériel technologique et une menace costumée, le Fantôme. Les scénaristes ont voulu en faire une figure plus nuancée que dans le premier volet, tourmentée par un problème physique qui en fait un danger intangible mais aussi instable psychiquement, mais dont on peine à craindre la dangerosité, et c’est le même problème pour le reste, malgré beaucoup de blablas qui veulent donner de l’importance à ces petits tracas.

Cela fait beaucoup d’ingrédients ajoutés pour faire tenir un film sur la durée des 2 heures et qui peine à convaincre de son intérêt, n’arrivant que trop peu à créer de scènes véritablement fortes, vraiment marquantes, contrairement au premier.

On peut même ajouter que le film a perdu une part de sa pertinence, avec son intégration vraiment réussie des changements d’échelles à ses scènes les plus spectaculaires. Ant-Man et la Guêpe en proposent bien quelques unes, mais va utiliser un des ajouts de Captain America: Civil War, la possibilité de grandir plutôt que rapetisser. Ant-Man le héros sous-estimable notamment car on méjugeait ses capacités peut maintenant devenir aussi grand qu’un géant, sous conditions. On rentre ainsi dans l’habituelle “cour des grands”, du toujours plus, loin d’une certaine humilité, même si le film n’exploite pas que ce pouvoir tout du long. Mais le mal est fait.

Le premier film jouait tout de même mieux du rapport d’échelles, avec ce héros miniature dans un décor du quotidien, avec quelques belles scènes imaginatives. Il y a bien quelques idées, mais elles sont trop rapidement oubliées ou pas assez exploitées, à l’image de cette course-poursuite en voiture à la taille “hot wheels” qui développée aurait offert au film une scène marquante alors qu’il en manque.

Et même si le méchant du premier volet manquait d’épaisseur, son affrontement dans la chambre d’enfants représentait un véritable tour de force technique. Sans véritable protagoniste un tant soit peu musclé, le film ne peut pas proposer de combats dignes de ce nom, et cela se ressent.

Le film de Peyton Reed, à nouveau aux commandes, reste convaincant dans la tranche de vie de ses personnages, avec une certaine décontraction amusée qui permet quelques scènes plus légères et toujours aussi réussies. Mais avec sa trame globale gonflée à l’excès et sans véritable nouvel ajout plus surprenant, la suite apparait comme une extension du premier et de son univers, mais pas comme le film entrainant qu’il aimerait être. De quoi écorner le capital sympathie d’un film qui avait su trouver sa place. Pas de quoi enterrer le charmant Paul Rudd et son personnage, qui a son importance dans Avengers: Endgame en 2019 et plus récemment d’une nouvelle suite en 2023.

SimplySmackkk
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le 24 févr. 2023

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