Les GI de Coppola sont des barbares incultes qui ne trouvent exaltation et excitation que dans la mort et la désolation, la destruction, le carnage ; les Walkyries de Wagner sont des FEMMES guerrières qui arrivent APRÈS la bataille et trouvent exaltation et excitation dans la RESSUSCITATION des guerriers les plus braves ; les Walkyries donnent une seconde vie à ceux qui sont morts, là où les GI massacrent, réduisent en cendres, exterminent ; les GI sont des sauvages, l'œuvre des Walkyries est civilisatrice. La Chevauchée des Walkyries est donc l'extrait le plus MAL CHOISI pour accompagner la ruée des GI, car elle est en réalité leur négation même [les Walkyries, et encore plus celles de Wagner, sont la négation des GI].
Il y a donc là un véritable coup de génie, de la part de Francis Ford Coppola : il ne se contente pas de montrer l'œuvre POSITIVE de destruction de l'impérialisme américain (le napalm, les maisons incendiées, etc.) ; il montre que cette destruction se prolonge en une destruction du Sens lui-même, des valeurs, de tout un négatif civilisateur : l'art, la musique, l'Amour (parce que la Chevauchée des Walkyries est un chant d'Amour [un chant de Vie et d'Amour]) sont niés en leur sens ; la bêtise, qui sert la pulsion de Mort, leur en confère un autre ; ce qui est un assassinat de la dernière monstruosité.
Mais ce coup de génie ne se comprend, la profondeur de la dénonciation de la monstruosité des GI par Coppola ne se comprend, que si l'on a auparavant écouté, EN ENTIER, l'opéra [le drame lyrique] de Richard Wagner ; ça n'est que dans le récit global que cette Chevauchée prend tout son sens.
Le coup de génie de Coppola a porté manifestement plus loin que ce qui était prévu : c'est comme si tout le monde désormais n'écoutait plus la Chevauchée des Walkyries que dans l'esprit des GI de Coppola, au travers de leur CONTRE-sens monstrueux ; plus grand-monde n'entend le chant de Vie et d'Amour.