Que pourrais-je apporter à l'analyse d'un film sur lequel tout a déjà été dit, si ce n'est qu'il s'agit donc ici du « Final Cut », soit la version vraiment définitive que voulait Francis Ford Coppola après un « Redux » ajoutant environ quarante-cinq minutes au montage initial de 1979, auquel celui-ci en enlève une dizaine. Dire que j'étais allé le voir au cinéma et que j'ai dormi quasiment la moitié du temps suite à une journée harassante au point de mettre (légèrement) en doute son statut de chef-d'œuvre incontesté : honte à moi, libre à vous de m'insulter et de me rouer de coups.
En attendant, c'est donc un peu l'œuvre ultime qui nous est présentée là : s'appropriant et réinventant totalement « Au cœur des Ténèbres » (assez ennuyeux, osons l'écrire), le réalisateur du « Parrain » signe une plongée magistrale dans l'horreur de la guerre du Viêt Nam, rendue aussi hypnotique que terrifiante, aussi fascinante que suffocante.
S'appuyant sur l'étourdissant travail de Vittorio Storaro à la photographie (l'une des plus belles de l'Histoire du cinéma, clairement!), ces trois heures de grand cinéma, traversé d'éclairs de génie (l'introduction, la mythique scène des hélicoptères entrant en scène sur « La Chevauchée des Walkyries ») de fulgurances visuelles dingues, résonnent longtemps en mémoire après visionnage, et ce évidemment jusqu'à un final monumental, somptueux cauchemar semblant tout droit sorti des Enfers.
Martin Sheen y trouve (de très loin) le rôle de sa vie, entouré d'acteurs apparaissant plus ou moins longtemps mais ayant tous marqué leur rôle. Le septième art à son apogée, défiant le réalisme pour mieux le montrer tout en le sublimant à travers des décors et une mission irréelles : monsieur Coppola, pardon, mille fois pardon d'avoir douté ne serait-ce qu'un instant de votre génie.