Vous croyez avoir des problèmes avec vos voisins, attendez d'avoir vu As Bestas, vous allez relativiser. Voici donc l'affreuse cohabitation d'un couple de français récemment installés dans une province reculée d'Espagne, où les habitants n'apprécient pas trop les nouveaux arrivants (traduisez par : ceux qui n'ont pas trois générations d'ancienneté locale) et vont le leur faire savoir... Si ce nouveau Sorogoyen n'atteint jamais la flamboyance du précédent El Reino (petit bijou de tension), il peut néanmoins compter sur son très bon casting, Denis Menochet nous ayant autrefois appris à nous méfier de son air calme (Jusqu'à la garde, on en reste encore traumatisé) qui s'associe à la détresse sensible de Marina Foïs en épouse prête à tout pour soutenir son mari contre les voisins frappadingues. Quant aux fameux voisins, on peut dire que Luis Zahera et Diego Anido nous ont fait transpirer, dans des scènes qui misent sur leur air impassible, assurant l'imprévisibilité de l'issue finale (cette histoire va-t-elle finir en bain de sang ? Entre gens raisonnables ?). On regrettera d'ailleurs cette dernière partie trop sage, presque molle, qui dénote complètement avec ce que la tension nerveuse de l'ensemble du film nous laissait espérer jusque-là, on termine carrément sur notre faim. Inutile de dire également qu'on n'a pas apprécié l'ouverture qui, en voulant rendre hommage à l'immobilisation traditionnelle des chevaux par la force (magnifiée par la mise en scène qui voudrait qu'on soit admiratif de voir le cheval paniquer...), nous donne surtout envie de finir les bourreaux à coups de pelle. Il n'en reste pas moins que Rodrigo Sorogoyen continue de nous prouver combien il excelle à planter des ambiances tendues, à choisir un casting digne de porter cette atmosphère poisseuse sur les épaules, à construire des plans soignés et à nous appâter avec une intrigue dont on veut absolument savoir la fin. Dommage que cette fin n'a pas été à la hauteur après la scène-clé très réussie, on reste persuadé que Sorogoyen aurait pu s'éclater dans cette dernière partie, et nous avec.