Rares sont les films aussi inégaux qu'As Bestas, tant sur le fond que sur la forme.
Les scènes du café d'Eusebio sont une franche réussite. Autour de la table dans la salle enfumée, l'atmosphère alterne entre conviviale et tendue ou glauque à souhait. Le théâtre est parfait pour accueillir les tensions émanant de l'arrivée de néo-ruraux CSP + et français qui plus est dans ce village de Galice tombé en désuétude, avec un fantomatique rachat potentiel des terres par une entreprise d'éolienne comme toile de fond et origine du conflit. On se sent nerveux pour Antoine, devant la présence piteusement charismatique de Xan, son nemesis, cinquantenaire originaire du village, ivrogne aigri et célibataire endurci, armé d'une verve coupante au service d'une logique de conflit de classe implacable. Méchant, veillant avec un amour triste sur son frère rendu débile par un accident, sublime anti-héros venu voler la vedette du film.
Les scènes de famille n'ont en revanche au mieux aucun intérêt (celles avec la fille du couple feront même rougir d'embarras les habitués de malaiseTV) et viennent rallonger, voire gâcher le film, en faisant retomber l'angoisse du film noir pour au final diluer l'ambiance en un mélange trouble de drame social/thriller. Idem pour les jeux de caméra dont certains plans séquence (dans la forêt ou le puit) donnent une véritable intensité à la scène et d'autres (encore cette scène gênante de l'embrouille dans la cuisine) où elles donnent simplement mal au coeur.
Bref un film oscillant du meilleur au pire. Dommage que le mauvais soit surtout à la fin car on s'impatiente, remue sur son siège, et emporte avec soi un petit goût de déception.