Olga et Antoine sont un couple français d'intellectuels, qui ont décidé de tout plaquer pour se lancer dans une ferme bio en plein ruralité. Tout en retapant les maisons du coin, espérant attirer les gens à la campagne.
Problème : ils ont choisi un lieu très reculé de Galice, et se sont rapidement attirés les foudre de leurs voisins. Etrangers, nouveaux arrivants, écologistes, porteur d'un nouveau mode de vie, et surtout un refus d'installer de juteuses éoliennes qui auraient profité au hameau isolé. Ils ont toutes les tares pour les locaux ! La tension montera crescendo...
Le pitch fait évidemment penser à "Straw Dogs" de Peckinpah, néanmoins "As Bestas" se démarque très rapidement de ce "modèle" (involontaire ?).
Ce qui frappe dès l'irréaliste scène d'introduction est la grande maîtrise derrière la caméra de Rodrigo Sorogoyen. L'image est soignée, mais surtout la gestion des lieux, du stress et de l'angoisse est impeccable. L'intrigue ne commence pas avec l'installation du couple, mais des années mois/après, alors que les rixes ont déjà commencées.
Le réalisateur exploite ensuite les fermes confinées et mal éclairées tout autant que les montagnes jolies mais froides et peu fréquentées. Les différences de langue, l'isolement des protagonistes, les embrouilles à base de broutille, l'inefficacité des pouvoirs publics...
Ce qui donne lieu à un paquet de scènes fortes, et des confrontations filmées en plans-séquences viscéraux. Savoir qu'il s'agit malheureusement d'un fait divers bien réel ajoute au malaise permanent. Pour l'anecdote, dans la vraie vie les événements se sont déroulés avec un couple néerlandais, avec à la clé un documentaire et un procès en 2018.
Outre la mise en scène, ce sont évidemment les acteurs qu'il faut saluer. Dont un trio principal particulièrement impressionnant. Luis Zahera, ultra-flippant en grosse brute obtuse qui domine le bar du coin. Denis Ménochet, qui retourne comme un gant son jeu de "Jusqu'à la Garde", incarnant ce Français déterminé, mais perdu, brisé, et menacé constamment. Marina Foïs, d'abord en retrait, puis subtil et poignante et épouse qui ne lâche rien.
Je dirais qu'il y a un léger bémol sur la durée, 2h12 étant peut-être un poil généreuse sur le sujet. Néanmoins la gestion du temps et des mois/années qui s'écoulent par saison est pertinente.
Un thriller psychologique très solide !