Au Service du Diable, production belgo-italienne, est l'unique réalisation de Jean Brismée, ancien professeur de mathématiques et de physique et auteur de plusieurs courts métrages didactiques pour la télévision belge. Le générique mentionne André Hunebelle, cinéaste bien connu à l’époque, comme « superviseur » du film. Il était en effet fréquent à l’époque, lors d’une première réalisation, d’être épaulé par un cinéaste reconnu dont le nom servait de caution, comme nous l’apprend Christophe Bier dans le splendide médiabook édité par Artus films. En réalité, comme en témoigne le réalisateur, « Hunebelle est venu une seule fois sur le tournage, lorsque nous tournions la séquence du début, avec la journaliste qui court dans la forêt et se fait assassiner. Son cadavre est ensuite étendu sur une table, dans la ferme. Les paysans sont réunis autour de la table et le regardent. J’ai tourné toute cette séquence en présence d’Hunebelle, qui m’a d’ailleurs fait un joli compliment. Il m’a dit : « c’est exactement ce que Bresson aurait fait ! » Rassurez-vous, je ne me prends pas pour Bresson ! Mais c’est la seule fois où j’ai vu André Hunebelle, je ne l’ai jamais revu par la suite. » Le film est typique du cinéma d’exploitation des années 70 et comporte une inévitable et longue scène de lesbianisme qui a en grande partie été rajoutée par les producteurs comme en témoigne ici encore le réalisateur : « Moi, je me suis arrêté à ce panoramique, ou un petit travelling qui arrive sur le lit. Et puis sans rien me dire, parce qu’il savait que je ne le ferai pas, les producteurs ont tourné le reste de la scène derrière mon dos. » Le scénario est hyper classique avec le thème des voyageurs qu’un incident, ici une route barrée, amène à s’arrêter dans un sinistre château. Mais il est original par l’introduction du thème des sept péchés capitaux représentés par chacun des voyageurs. En ce sens, il annonce Seven, le film de David Fincher, sorti en 1995. Il vaut aussi par son excellent casting, Jean Servais, Erika Blanc, Lucien Raimbourg et, surtout, l’exceptionnel Daniel Emilfork dans le rôle du diable. Il faut signaler que, comme beaucoup de films d’exploitation de l’époque, Au service du diable a bénéficié de plusieurs sorties sous des titres différents, notamment Le château du vice pour sa première sortie en salle à Paris le 3 avril 1974. Inégal, imparfait, Au service du diable comporte tout de même de belles séquences. C’est surtout un film qui a une âme et qui est vraiment très attachant.