De la lessiveuse qu'est Babylon, difficile de ne pas ressortir hagard, autant conquis par la démesure de l'entreprise et sa flamboyante mise en scène que quelque peu ébahi par une surenchère vulgaire, censée en particulier refléter les dernières années du muet. On y voit quelques figures connues, désignées sous leur vrai nom (Thalberg) ou pas ("Fatty, Arbuckle) mais l'essentiel est ailleurs, dans une chorégraphie de l'excès au sein d'une vue d'ensemble chaotique de Hollywood, qui va se transformer, s'organiser et s'assagir avec l'arrivée du parlant puis du célèbre code Hays. Ce panoramique exubérant se focalise sur trois destins particuliers au sein de ce capharnaüm qui flirte avec le grotesque (assumé et cultivé), afin de nous guider dans ce monde de libertés et d'outrances, ces dernières étant plus que complaisamment montrées, aux frontières du dégoût (voir les séquences "animalières", notamment, avec un éléphant, un serpent et un rat pour protagonistes). Dans ce numéro d'équilibriste entre paillettes et vomi, Babylon joue une partition somme toute classique de décadence avec les stars, mais avec une puissance visuelle dévastatrice et un sens du rythme échevelé qui gagne en spectaculaire ce qu'il perd en profondeur, sans même parler d'émotion. Damien Chazelle ose tout, etsurtout le mauvais goût, pour mieux clamer son amour du cinéma, un art finalement plus grand que ceux qui le confectionnent, quelles que soient leurs turpitudes. Dans ce maelström baroque et scandaleux, le trio composé de Brad Pitt, Margot Robbie (déchaînée) et Diego Calva tirent leur épingle du jeu, avec un certain panache.

Cinephile-doux
7
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste Au fil(m) de 2023

Créée

le 21 janv. 2023

Critique lue 224 fois

11 j'aime

4 commentaires

Cinephile-doux

Écrit par

Critique lue 224 fois

11
4

D'autres avis sur Babylon

Babylon
Sergent_Pepper
8

Door to the pictures

La sempiternelle question de la mort du cinéma semble avoir pris du galon ces dernières années, entre essor des plates-formes, fermeture des salles sous pandémie et difficultés de la reprise. Elle...

le 18 janv. 2023

250 j'aime

19

Babylon
JorikVesperhaven
5

Boursouflure hollywoodienne dégénérée.

Beaucoup de grands artistes ont leur film malade voire maudit. Une grande fresque pleine d’ambition dont le résultat n’est pas mauvais mais boiteux et souvent trop hermétique hormis pour celui à...

le 12 janv. 2023

149 j'aime

3

Babylon
Eren
10

Mille & une cuites

On le sait depuis quelques jours, le film de Chazelle a fait un gros bide pour son entrée au cinéma. Je ne vais pas m’étaler sur la question du pourquoi et du comment de ce bide, même si cela a...

Par

le 6 janv. 2023

125 j'aime

25

Du même critique

As Bestas
Cinephile-doux
9

La Galice jusqu'à l'hallali

Et sinon, il en pense quoi, l'office de tourisme galicien de As Bestas, dont l'action se déroule dans un petit village dépeuplé où ont choisi de s'installer un couple de Français qui se sont...

le 28 mai 2022

80 j'aime

4

France
Cinephile-doux
8

Triste et célèbre

Il est quand même drôle qu'un grand nombre des spectateurs de France ne retient du film que sa satire au vitriol (hum) des journalistes télé élevés au rang de stars et des errements des chaînes...

le 25 août 2021

79 j'aime

5

The Power of the Dog
Cinephile-doux
8

Du genre masculin

Enfin un nouveau film de Jane Campion, 12 ans après Bright Star ! La puissance et la subtilité de la réalisatrice néo-zélandaise ne se sont manifestement pas affadies avec Le pouvoir du chien, un...

le 25 sept. 2021

74 j'aime

14