C'est fait ! J'ai enfin pris le temps de découvrir ce Bad Lieutenant (1992) signé Abel FERRARA, cinéaste qui jusqu'ici ne m'avait guère convaincu à travers les trois films que j'avais vu de lui, qu'il s'agisse du déplorable Tommaso (2020), du voyeuriste et sans grand intérêt L'Ange de la vengeance (1981) ou de The King of New York (1990) qui sans m'enthousiasmer me paraissait plus intéressant. Verdict : j'ai largement préféré cette proposition.
D'abord et en premier lieu, j'ai enfin vu une mise en scène pertinente, que j'ai sentie habitée par l'âme de son réalisateur, entièrement pensée et commise pour illustrer son récit et le parcours de ses personnages. Jouant sur des jeux d'ombres et lumières à poser visuellement en parallèle avec la noirceur de ce flic qui en dépit de ses nombreuses parts d'ombre parvient à nous montrer en divers endroits son humanité.
Film d'une noirceur rare, auscultant voire même autopsiant l'âme sombre d'un homme bouffé par ses vices, absolument ignoble dans son comportement mais qui viscéralement ancré dans son approche catholique de la rédemption et du pardon, va à l'aune d'un fait divers, pourtant pas plus sordide qu'un autre s'évertuer à se racheter, la question étant alors de savoir s'il y parviendra ou si il est définitivement condamné à la damnation éternelle.
Les scènes d'effroi s'enchainent, ne laissant jamais au spectateur le loisir d'une respiration, que ce soit ses déchainements de violences, ses rapports viciés aux autres, à tous les autres, ou les scènes de prises de drogues qui sont d'un réalisme à la fois choquant et tellement rigoureux sur l'exactitude des effets que peuvent procurer ces produits, j'en parle en connaissance de cause étant moi-même un ancien polytoxicomane et autant les mises en scène spectaculaires de films comme Trainspotting (1996) ou Requiem for a dream (2001) me font doucement rire tant elles sont le fait de personnes n'ayant manifestement jamais usé de dopants, autant là j'ai revu des scènes et des situations d'un glauque absolu qui ont raisonné en moi de façon paradoxalement douloureuse et mémorielle.
J'avoue que je suis encore en pleine digestion de l'expérience "Bad Lieutenant", Harvey KEITEL est immense, il est en tout cas évident que je comprends qu'on m'ait conseillé ce film et alors que j'avais dit en conclusion de ma critique sur "The King of New-York" que si celui-ci ne me convainquait pas d'avantage j'en conclurai que ce cinéaste ne me correspondait pas, maintenant je suis curieux d'en découvrir d'autres et j'invite mes lecteurs à m'indiquer vers quoi me diriger.