Jointure étonnante entre la fin du western américain et un western italien en plein essor, « Barquero » est difficilement classable tant on sent l'influence des deux univers durant 105 minutes. On sent que Gordon Douglas n'est ici pas aussi à l'aise qu'il ne pouvait l'être avec « La Maîtresse de fer », son chef d'œuvre, mais celui-ci reste un professionnel et l'entreprise est plaisante à suivre, avec même quelques fulgurances particulièrement bienvenues. On pense notamment à plusieurs scènes fortes, mais aussi à l'interprétation démentielle de Warren Oates, trouvant enfin un rôle à la mesure de son talent avec ce méchant de haute volée. Le réalisateur a en effet eu la bonne idée de donner un passé et un fort caractère à ce surprenant salaud, sur lequel on apprend en définitive beaucoup plus que le mystérieux Travis, interprété par un Lee Van Cleef encore plus sobre que d'habitude. Après, il est vrai que l'opposition entre riverains et pilleurs traîne légèrement en longueurs, mais grâce à une dose d'humour (truculent Forrest Tucker), une musique inspirée, des décors bien exploités et des personnages supérieurs à la moyenne, le film a de la gueule, à l'image de ce brutal duel final. Bref, sans être aussi réussi que les plus grands Ford ou Leone, « Barquero » parvient néanmoins à séduire dans son aspect « ricain » comme « spaghetti » : une satisfaction.