Hier, pour tuer le temps en attendant une aimable autorisation du gouvernement pour avoir le droit de recommencer à travailler – cela fait bientôt quatre mois et demi que les cinémas sont fermés –, je me suis fait un double programme Die & Retry, ce sous-genre du film de boucle temporelle, elle-même une thématique déjà fort éculée dans le cinéma (avec l’incontournable Un jour sans fin, ou bien le plus récent Palm Springs sorti sur Amazon Prime Vidéo par exemple).
Au menu donc : Boss Level, film tout juste sorti directement en DVD / VoD (généralement, cela veut dire qu’aucun distributeur-salle ni plateforme de streaming n’a daigné s’intéresser au projet) et dont je n’attendais pas grand-chose aux vues des réactions des chroniqueurs de Pardon le cinéma, qui ont plutôt démoli le film ; suivi de Edge of Tomorrow, sans doute le meilleur film appartenant à ce sous-genre, avec sa fameuse tagline « Vivre, Mourir, Recommencer ».
Autant dire un bond qualitatif important entre les deux films !
Mais là où le film de Doug Liman – avec Tom Cruise et Emily Blunt au casting – est un excellent défouloir, un film d’action/de guerre hyper prenant, utilisant intelligemment son concept d’extraterrestres maîtrisant le temps, Boss Level reste en surface et n’apparaît être qu’une coquille vide. Un « contenu » pour alimenter le besoin d'« un consommateur ». Pas grand-chose à voir avec du cinéma.
Le principal compliment que l’on puisse faire à Boss Level, c’est qu’il a la politesse de ne pas ennuyer son spectateur. Le film ne lésine pas sur les scènes d’action, les fusillades, les courses-poursuites en voiture.
A part un ou deux moments où le rythme retombe pour s’enliser dans des dialogues creux et interminables (notamment la séquence où Frank Grillo et Naomi Watts [qui incarnent un ex-couple ayant eu ensemble un enfant désormais ado], discutent de leur vie passée [il faut bien tenter de caractériser un minimum les personnages)] et du risque éminent de fin du monde à cause d’une grosse machine mise au point par les méchants, à savoir le gouvernement), la testostérone est au rendez-vous.
Joe Carnahan, réalisateur de Boss Level, n’est pas vraiment connu pour faire dans la finesse, l’artistique et le sentimental. C’est notamment le réalisateur de L'Agence Tous Risques en 2010, et le scénariste de Death Wish et plus récemment Bad Boys for Life. Boss Level s’inscrit donc dans la continuité de son œuvre : une nouvelle petite daube au compteur.
Côté pitch, nous retrouvons Roy, ancien agent des forces spéciales américaines, piégé dans une boucle temporelle avec pour mission de se débarrasser d’une douzaine de tueurs badass à ses trousses, et de sauver l’humanité avant la fin de la journée. Et ça commence très fort avec pour chaque réveil, la visite d’un tueur muni d’une machette, et d’un hélico de l’armée qui vient soulever la poussière de son appartement.
Le film opte (heureusement) pour le ton de la comédie en mettant un peu de fun dans les différentes morts auxquelles est confronté Roy.
Mais la réalisation est calamiteuse. Si l’on oublie la quantité astronomique de faux raccords (à commencer par le plus gros de tous, celui du réveil : Roy-le-Don-Juan est sensé se réveiller aux côtés d’une gentille assistante dentaire blondinette rencontrée la veille dans un bar, mais celle-ci disparaît un réveil sur deux), les effets spéciaux font vraiment cheap. En particulier les explosions de voitures, vraisemblablement ajoutées en post-prod par le stagiaire.
Les ajouts de texte à l’écran « façon gamer » ne sont qu’une pâle tentative pour rendre hommage aux jeux vidéos d’arcade des années 90, et n’apportent strictement rien de neuf.
Tout juste passable, Boss Level rempli son rôle : occuper l’esprit pendant ces longues semaines à rien foutre. Mais pour un film de qualité, il faudra repasser.