Il est incroyable comme la réputation d'un film peut nous prédisposer à l’appréhender négativement ou positivement, et surtout (mais ça ce n'est pas nouveau) comment cette dernière ne reflète pas nécessairement la qualité du film en question.
Pourquoi un film comme Cannibal Holocaust était toujours présenté comme un film d'horreur dégueulasse dépourvu de qualités ? Et bien, à mon humble avis, c'est parce que lorsqu'on montre à un public ce qu'il ne veut pas voir, il ignorera toutes les éventuelles qualités techniques et narratives du film et n’hésitera pas à le descendre impitoyablement (et au contraire, lorsque l'univers dépeint est plus en phase avec sa sensibilité, ce dernier a tendance à surévaluer ces mêmes qualités).
On peut facilement ne pas apprécier le film de Deodato: Cannibal Holocaust dépeint la sauvagerie, et en conséquence c'est un film sauvage et potentiellement désagréable. Mais la mauvaise foi critique qu'il subit est parfois agaçante: on omet souvent ses trouvailles (le film dans le film évidemment, mais aussi le contraste entre la sauvagerie des images et la douceur de la BO signée Ortolani) et son impact.
Le "Salo" de Pasolini a beau ne pas être apprécié de tout le monde, on ne le présentera jamais comme un "film d'auteur dégueulasse" mais plutôt comme "sulfureux et controversé". Ses qualités plastiques et thématiques ne sont jamais remises en question, même en cas de rejet du film dans sa globalité.
Personnellement, j'ai été très marqué par l'intensité de CH, amplifiée par la réalisation nerveuse de Deodato (notamment lors de la deuxième moitié). Le message est simple (la sauvagerie ne se trouve pas toujours ou l'on croit) mais traité de manière explosive: la violence est crue et explicite, mais (en tout cas de mon point de vue) rarement racoleuse, et toujours cohérente avec le propos du film (ce qu'un autre film sulfureux récent, "A Serbian Film" n'a pas toujours su maîtriser en se perdant dans des délires grand-guignolesques).
Quant aux violences animales, bien que regrettables d'un point de vue éthique, elles font à présent partie intégrante de l'identité du film, et contribuent à son impact (Deodato a sorti récemment une version coupée les omettant, dommage pour quelqu'un ayant posé ses couilles sur la table si violemment en 1980 de les ranger plus de trente ans après).
Et puis Sergio Leone a déclaré avoir été très impressionné par le film, et ce n'est pas nous, pauvres mortels, qui allons le contredire ;)
Allez pour le plaisir:
https://www.youtube.com/watch?v=kf1Vt6r-sj8