Lors des premières minutes, on voit Al Capone s'amuser avec des enfants dans son jardin, puis il tombe dans la boue. On pourrait résumer l'ambition du film à ce plan : prendre cette figure mythique et la trainer dans la boue, montrer les derniers jours peu glorieux du plus célèbre des gangsters. Le film est d'ailleurs comparable à The Irishman, dont la dernière demi-heure montrait aussi la vieillesse et la décrépitude de ces anciens princes du crime. Pourtant, là où The Irishman arrivait à humaniser ses personnages et à offrir une réflexion sur leurs actes passés, Capone reste superficiel, formel. Même le titre en est révélateur. Devant à la base s'appeler "Fonzo", surnom utilisé par les proches d'Al Capone, le film va finalement s'appeler Capone, titre plus général et moins intimiste. Or c'est exactement ce qu'aurait dû faire le film : entrer dans l'intimité et explorer la psyché du personnage.
Alors certes, le film délivre ce qu'il a promis : voir la fin de vie d'Al Capone, rongé par la syphilis et souffrant d'hallucinations sévères. Mais c'est tout ce qu'il raconte. Il y a bien une tentative de créer un enjeu (trouver une somme d'argent caché) mais celui-ci est beaucoup trop artificiel et peu intéressant. Certaines idées sont suggérées, mais jamais complètement exploitées. La relation de Capone avec son fils ou avec sa femme sont des pistes intéressantes mais n'arrivent jamais à émouvoir, car on ne connait pas ces personnages. C'est là le grand défaut du film : à se focaliser sur la chute d'Al Capone, il en oublie tout ce qui vient avant. La chute d'un homme n'est tragique que lorsqu'on a vu ses accomplissements et ses succès. Les plus grand films de gangsters ont tous suivi ce schéma : suivre la montée au pouvoir des personnages pour ensuite en montrer la fin. Scarface, Goodfellas, Casino, The Irishman, c'est comme ça qu'on arrive à saisir la réelle violence de la perte de pouvoir. Capone ressemble plus à une conclusion de film qu'à un film complet. Alors peut-être que Josh Trank avait trop peur de réutiliser les mêmes codes que d'autres films du genre, ou qu'il a considéré que tout le monde savait déjà qui était Al Capone et qu'il était inutile de le présenter. Sauf qu'on est dans un film, et dans un film, il faut connaitre les personnages pour s'attacher à eux, or on ne sait rien d'eux. On ne sait pas qui sont les amis de Capone, quelle relation il entretient avec eux, comment est-ce qu'il considère sa femme ou ses enfants. On ne sait rien ! Un simple montage en début de film pour résumer la vie des personnages aurait été amplement suffisant.
En plus de cela, la forme du film n'est pas des plus engageante. Les plans sont jolis et la réalisation est correcte, mais le tout est beaucoup trop carré. Tout est filmé de manière banale et académique. Mêmes les hallucinations du personnage principal manquent de folie et d'imagination, exceptées les deux dernières qui sont vraiment sympas :
l'homme qui s'arrache les yeux et la crise de Capone dans son jardin, suivi d'un tsunami.
Néanmoins, le film semble se réveiller vers la fin, proposant des images vraiment uniques. Voir Capone en peignoir, couche culotte, carotte à la bouche et une mitraillette dorée dans les mains, ça n'a pas de prix.
Cela nous amène évidemment au gros point positif du film : Tom Hardy. Absolument génial, il incarne à la perfection un Capone psychotique et malade. Il porte le long-métrage sur ses épaules et apporte une véritable personnalité à l'ensemble. Si il y a bien un argument pour aller voir ce film, c'est lui.
Pour conclure, même si la majorité de ma critique est plutôt négative, le film est quand même très agréable et propose un regard neuf sur une figure archi-connue et ça, c'est déjà un bon point. Il est quand même dommage que le tout manque un peu d'ambition et de profondeur.