C'est presque le risque aujourd'hui : dès que vous osez sortir du rang en présentant un film offrant une vision ultra-réaliste, sombre et pessimiste, il y a de grandes chances que le public ne suive pas. « Cartel » en est l'implacable démonstration, tant les critiques ont été nombreuses sans tenir compte des profondes qualités de l'entreprise. Alors je ne dis pas : ça parle beaucoup, et si je ne me suis pas ennuyé, on perd légèrement en émotions ce qu'on gagne en crédibilité. De plus, on ne comprend pas toujours tout, si bien qu'un peu plus de précisions n'auraient pas été de trop.
Toutefois, il faut reconnaître que Ridley Scott surprend franchement à travers ce constat désespéré sur la nature humaine, superbement mis en images et nous offrant plusieurs scènes mémorables, aussi violentes par moments que sexy à d'autres. Et puis il n'y a pas à dire : avec pareil casting, difficile de ne pas voir la température monter, avec une petite préférence (une fois n'est pas coutume) pour Brad Pitt, étonnant en intermédiaire aussi lucide que cynique. Bref, si la réunion d'autant de talents (sans oublier Cormac McCarthy au scénario) pouvait laisser espérer quelque chose d'immense, il serait toutefois dommage de passer à côté d'une œuvre désabusée, glaçante et finalement très représentative du monde actuel, à l'image de plusieurs échanges aussi brillants que terrifiants : percutant.