Cela faisait un bon moment que je n'avais pas vu un film de Frank Borzage. « Ceux de la zone » est sans doute l'un de ses plus célèbres, ses qualités restant évidentes aujourd'hui. Il y a bien certains aspects ayant clairement vieilli, comme la grande majorité des œuvres tournées dans les années 30, notamment dans l'aspect technique ou encore l'approche que peut avoir le réalisateur du couple : on peut trouver « too much » le comportement très macho de Bill, la « niaiserie » de Trina, sans oublier un « méchant » qui aurait gagné à être plus nuancé.
Mais cela passe sans trop de mal par la douceur et la sensibilité du réalisateur, qui, par sa mise en scène à la fois simple et précise (à condition d'accepter les convenances de l'époque, donc), parvient à rendre réellement touchant ce récit à forte connotation sociale, où quasiment tous les choix peuvent se justifier : le comportement de Bill cache ainsi probablement une forme de pudeur, une incapacité à exprimer ses sentiments, que l'interprétation étonnante de Spencer Tracy conforte. Quant à Loretta Young, son sourire, sa douceur en font une jeune femme à laquelle il est effectivement difficile de rester insensible.
Coup de projecteur également sur les deux beaux seconds rôles que sont Walter Connolly et Marjorie Rambeau, apportant une identité, une personnalité plus forte à cette histoire, certes très mélo dans sa logique, mais racontant une vraie histoire d'amour, élégante et bien écrite, sachant aller à l'essentiel (moins de 70 minutes). Un cinéma qui ne parlera sans doute pas à tout un pan de spectateurs, mais qui, pourtant, s'avère joliment représentatif de ce que pouvait offrir le septième art il y a de cela quelques décennies. Touchant.