Deux critiques écrites à dix ans d'intervalle, la première peu de temps après sa sortie en salles, la seconde lors de son revisionnage en 2022 pour un ressenti ayant finalement peu évolué.
Première critique (2012) (7/10) :
On peut reprocher beaucoup de choses à « Cloud Atlas », mais certainement pas son manque d'audace, ce qui, en cette époque souvent trop formatée, fait évidemment plaisir à voir. Indéniablement les maquilleurs ont parfois eu la main lourde, certains récits sont inévitablement plus intéressants que d'autres et l'ambition des « frères-soeurs » Wachowski et de Tom Tykwer était peut-être un peu trop importante lorsque l'on voit toutes les pistes et réflexions qui auraient mérité d'être d'avantage creusées. N'empêche : difficile de ne pas être porté par ce festival de couleurs, d'intrigues, de personnages se complétant parfois remarquablement, parfois moins, sans que notre plaisir ne soit réellement mis en cause.
Il y a une sorte de « beauté du geste », d'étrange poésie dans laquelle le film est bercé qui le rend assez inclassable, le « jeu de rôles » géant entrepris par les réalisateurs se faisant d'emblée stimulant et savoureux. Enfin, si certains passages sont donc plus faibles, reconnaissons que d'autres sont aussi brillants qu'émouvants, le dénouement très différent de chaque histoire renforçant ce sentiment d'hétérogénéité ici salutaire. Et puis il y a Halle Berry, plus belle que jamais au milieu d'un casting étonnant mais réussi, alors... Bref, si « Cloud Atlas » ne plaira pas à tout le monde, au moins aura t-il eu le mérite de nous offrir une expérience follement originale et me concernant très appréciable : il serait dommage de passer à côté.
Seconde critique (2022) (7/10) :
Second visionnage pour ce « Cloud Atlas » fort apprécié lorsque j'étais sorti de la salle obscure, regrettant encore aujourd'hui un échec commercial fort immérité. Cette « nouvelle chance » s'est révélée un peu moins porteuse, probablement due à un effet de surprise évidemment moins important (et au format de l'écran!). Reste que ces presque trois heures passent encore plutôt bien : même si j'ai été moins sensible à la dimension philosophique, presque métaphysique du discours, ce voyage à travers les siècles et les continents séduit, marque, offrant à la fois une idée de science-fiction et une réflexion assez complexe sur la question des origines, de vies antérieures et futures, permettant de faire rejoindre les différents récits sans forcément leur trouver un lien absolu à chaque fois.
Beaucoup de thèmes abordés : la vie, la mort, la création, l'amour, le destin, le totalitarisme, les nouvelles technologies au détriment de l'humain, sans qu'aucune n'en devienne écrasante : peut-être aurait-il même fallu en mettre certaines plus en avant. Enfin, ce qui bluffe évidemment tout particulièrement, c'est l'impressionnant travail sur les maquillages, presque un jeu de pistes à lui seul tant il est plaisant de repérer « qui est qui » à travers les différents univers, sans que cela soit réellement possible parfois, n'apparaissant jamais gratuit ou comme un simple gadget.
Beau casting, dont la toujours somptueuse Halle Berry, Ben Whishaw, Jim Broadbent ou un Hugh Grant manifestement heureux de sortir de son registre habituel. Les Wachowski (bien « secondés » par Tom Tykwer) comme on les aime, inventifs et ambitieux sans (trop) se prendre les pieds dans le tapis à travers des considérations trop fumeuses : à ceux qui ne s'y seraient pas encore essayés, le voyage mérite d'être vécu.