J'avoue que depuis l'insoutenable « Bancs publics (Versailles Rive-Droite) », j'avais quelque peu laissé de côté Bruno Podalydès réalisateur, ne découvrant « Comme un avion » que quatre ans après sa sortie. Sans doute aurai-je dû lui laisser une seconde chance plus tôt, car la surprise fut belle. Pourtant, habituellement, les contes hédonistes faisant l'éloge de la nature et du bien-être loin de la ville, cela me gonfle pas mal. Comme quoi, la manière dont on raconte une histoire est absolument essentielle, et l'ami Bruno ne s'y est pas trompé.
Même si l'on peut trouver cette passion soudaine pour le kayak peu crédible, sa réalisation décalée, burlesque juste ce qu'il faut et souvent poétique à souhait permet de nombreuses et réjouissantes envolées
(ce décollage nocturne fantasmée sur une musique magnifique, superbe moment),
chaque partie s'emboîtant harmonieusement, la merveilleuse Sandrine Kiberlain, en épouse que presque tout homme rêverait d'avoir, cédant la place à Agnès Jaoui et surtout l'irrésistible Vimala Pons, peut-être mon plus gros coup de cœur d'actrice ces dernières années. Alors oui : parfois, notamment à la moitié, le récit s'embourbe, l'acteur-réalisateur (pas mal du tout) ne semblant plus avoir grand-chose à raconter, en devenant même un peu lourdaud au point de nous inquiéter pour la suite.
Mais ce sentiment n'est que passager. Le film prend même une tournure assez inattendue, abandonnant presque entièrement sa virée aquatique pour un éloge de la paresse et du lâcher prise, voire de l'adultère, toujours avec le sourire et décontraction. On atteint même des sommets lors de
cette fête pour le moins arrosée où l'auteur du « Mystère de la chambre jaune » se laisse aller au plaisir de l'ivresse sur le génialissime « Don't Let Me Be Misunderstood » de Santa Esmeralda.
Un voyage bucolique étonnant, inhabituel, rêverie faisant le choix de prendre son temps, de revenir au simple plaisir du partage, de la liberté : un délice.