L'art de laisser le spectateur sur la joie. La joie de ce que l'imaginaire peut venir réparer, de ce que les erreurs disent à notre place.
Ryusuke Hamaguchi n'a vraiment pas besoin de grand chose. Un petit espace suffit. L'arrière d'un taxi, un bureau avec une porte ouverte (génie de cette histoire de porte dans le deuxième segment du film : c'est le troisième personnage du récit, et tout le rapport entre les deux humains se fait en fonction de cette porte), un petit salon avec une baie vitrée ou bien un escalator. Le petit espace devient grand, parce que Hamaguchi, avec ses personnages, l'habite aussitôt, le charge de mille affects, lui donne la dimension d'un lieu : le lieu où. On s'en souvient ensuite de cette façon : le lieu où il dit ça, le lieu où elle fait ça.
Les trois films qui composent l'ensemble sont comme trois esquisses, légèrement inachevées malgré les ellipses qui viennent nous donner le sentiment d'avoir fait le tour (mais c'est un peu artificiel - d'ailleurs le plus beau des trois récits est sans doute le troisième, et celui-ci se passe d'ellipse). Esquisses de relations, dans lesquelles surgit, par la mise en scène (ou par le jeu), l'inattendu. C'est-à-dire : la reconfiguration des données préalables à l'échange entre deux êtres humains. Et la dystopie que propose le troisième segment témoigne de cet espoir : que quelque chose, entre les gens, change enfin, se révèle, se métamorphose.