Les convoyeurs débandent

Bertrand Blier n'y est plus. Ses films ont toujours été embarrassants, magnifiquement embarrassants le plus souvent, dans les années 70, un cinéma de malaise, drôle, bizarre, et imprévisible.

En 2019, un film de Blier est juste gênant, dans le sens où l'on assiste à des scènes mal écrites, mal jouées, mal travaillées. Elles semblent avoir été tournées comme ça, sans intention particulière, parce qu'elles ont été commandées, et qu'elles sont nécessaires pour étoffer la vague idée de départ qui a germé dans la tête du réalisateur du Bruit des glaçons. Bref Bertrand Blier a branlé un truc à la va vite, et faut au moins 1h20 de péloche pour contenter les producteurs.

N'allez pas croire pas que c'est un changement fondamental dans sa façon de faire du cinéma, qui expliquerait cette médiocrité, car il a toujours procédé de la sorte. Préparez vos mouchoirs a été construit autour d'une seule scène très forte. Il a brodé autour avec un talent et une inspiration qui lui font aujourd'hui totalement défaut. L'inspiration et son casting. Car les meilleurs Blier datent de l'époque où il avait sous la main Depardieu, Dewaere, Serrault, Carmet, Miou Miou ou son père. C'est sûr que quand tu dois pondre des films avec Anouk Grinberg, le fils Berling, Farida Rahouadj ou Alex Lutz, faut s'attendre autre chose. A de la merde disons-le.

Et Convoi exceptionnel est un film de merde, pour employer le même langage cru qui tapisse ses films. Y a rien à sauver dans ce truc qui sonne comme une parodie de son cinéma. Même pas Depardieu, qui est fade. Un comble, un Blier ou Depardieu n'a aucun intérêt, ça fiche un coup, c'est comme un baiser sans moustache, ou une série Netflix sans un personnage trans dedans. Truffaut n'aurait jamais fait un coup pareil à Léaud. Eh bah Blier l'a fait à Gégé. Ce début parodique... quand on pense à celui de Calmos, si fulgurant, drôle et incorrect. Tout ce délire autour de personnages qui courent après un scénario pour savoir comment vivre leur vie... Ce parallèle vie / cinéma sans finesse, avec des séquences ultra niaises pour expliquer que leur vie c'est le cinéma et inversement (la rencontre avec le pauvre Guy Marchand). Une idée qu'on pouvait déjà apercevoir dans les acteurs et une sentimentalité que l'on n'a jamais rencontrée dans Buffet froid, les valseuses ou Préparez vos mouchoirs.