On ne peut pas dire que Clovis Cornillac nous ait vraiment surpris en bien et satisfait avec ses trois premières réalisations. Une première en forme de comédie romantique loufoque plutôt sympathique, « Un peu, beaucoup, aveuglément », puis deux films totalement oubliables : le troisième épisode de « Belle et Sébastien » (!) et le ridicule « C’est magnifique! ». Mais quand on voit « Couleurs de l’incendie », on se dit que ces dernières étaient probablement des séances d’entraînement, des brouillons, en soit des films pour se faire la main à la mise en scène. Car, en effet, sa réalisation est ici de toute beauté. Pour s’en convaincre, il n’y a qu’à voir le très beau plan-séquence inaugural. Grâcieux, ample et majestueux, il impressionne et nous absorbe dans le film directement. La caméra virevolte entre les différents acteurs au fur et `mesure que leur nom s’affiche au générique de la plus belle des manières et il faut avouer que c’est très réussi. Et la suite sera du même acabit. Cornillac ose des plans à la David Fincher (oui, oui, ...) mais n’abuse pas trop d’effets de style ostentatoires non plus. Et de la photographie à la direction artistique, tout est grandiose et à sa place. Un peu trop peut-être, on pourra trouver ça peut-être un peu rigide même si on est loin du film musée.
Avec « Couleurs de l’incendie », le comédien a réussi du grand et beau cinéma de papa, populaire et fédérateur, sans que cela soit péjoratif ici. Au contraire. Certes, rien ne dépasse et tout est très (trop?) à sa place mais cela correspond au roman dont le film est tiré. Un roman qui est en fait la suite écrite par Pierre Lemaître de son propre livre, « Au revoir là-haut », adapté lui par Albert Dupontel il y a quelques années et couronné de plusieurs Césars. Et il semble que cette suite méritait une mise en scène plus sage et cela lui sied bien. Et on est en droit de préférer cette œuvre-ci à celle du papa de « Bernie », au risque de choquer certains lecteurs de cette critique. L’adaptation de Dupontel était tout de même particulière bien que méritoire et celle-ci semble plus accessible, même si la comparaison n'est pas forcément utile. Ici, on ne nous parle plus d’une histoire d’arnaque mais de vengeance.
Une vengeance fomentée par une femme à qui des hommes véreux ont tout pris. Sans féminisme maladroit mais dans l’air du temps, « Couleurs de l’incendie » se déroule dans un contexte où le nazisme s’apprête à envahir l’Europe et donne une toile de fond intéressante au film. On déplore tout de même quelques facilités (au hasard, quand Alban Lenoir vole si facilement un colis sur le bureau d’une secrétaire ou lorsque Léa Drucker trompe les allemands). Ce qui passait peut-être dans le livre nous apparaît un peu gros en images. De plus, l’intrigue est parfois un peu technique (comme « Au revoir là-haut » dans un autre genre). Mais le long-métrage est agréable à suivre, intelligent et se pare de quelques notes d’humour bienvenues. Il nous passionne allègrement pendant plus de deux heures que l’on ne voit pas passer. C’est du grand cinéma comme on en fait plus que très rarement, aussi bon sur le fond que sur la forme même si on n’est jamais surpris.
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