Alors là, je dois dire que je suis complètement bluffé. À plusieurs titres.
D'abord, le DVD que j'ai acheté récemment à "petit prix" ne me disait rien alors que le film est sorti en 2022. J'ai beaucoup aimé et j'y reviendrai.
Je ne connaissais Clovis Cornillac qu'à travers quelques rôles d'acteur ("Faubourg 36", "Brice de Nice", etc …) sans en être très fan. Alors comme réalisateur, ça restait à voir …
Mais surtout j'ai découvert à travers le générique que le film était l'adaptation d'un roman de Pierre Lemaître qui se trouve être la (ou une) suite de "Au-revoir là-haut" que je n'ai pas du tout apprécié. Au point que si je l'avais su ou vu, je n'aurais peut-être pas acheté ce DVD.
ET je reconnais humblement que j'aurais eu bien tort !
Bon, évacuons tout de suite le sujet de la suite du roman. L'action de "couleurs de l'incendie" démarre en 1930 environ (au moment de la crise économique) et la guerre de 14-18 est un lointain souvenir, même pas évoqué. Difficile donc de raccorder les deux histoires à part le nom de famille de l'héroïne du film.
Le sujet du film pourrait se résumer de la façon suivante : Madeleine Péricourt hérite, avec son fils, d'un immense empire financier laissé par son père. Mal conseillée par son oncle, député véreux, et l'ancien adjoint de son père qui profitent de sa crédulité pour la spolier. S'en rendant compte, elle va patiemment bâtir un plan pour se venger de ces aigrefins sans scrupule.
Histoire classique qui, à elle toute seule, est déjà fort intéressante d'autant plus que la période historique s'y prête bien entre la crise économique, la montée du pouvoir nazi en Allemagne et la course aux armements un peu partout. Il y a de la matière.
Mais cette histoire se double d'une autre histoire tout aussi passionnante. En effet, le fils de Madeleine, d'une dizaine d'années, choisit le jour des funérailles de son grand-père pour se défenestrer pour une raison qu'on comprendra plus tard. Lourdement handicapé, il va retrouver le goût de la vie en écoutant des airs d'opéras d'une cantatrice en fin de carrière avec qui il entretiendra une correspondance tendre et enflammée. En parallèle à l'histoire sordide de vengeance, le film permet donc de sortir la tête du marigot des affaires en écoutant régulièrement de sublimes morceaux de musique lyrique. Même si ces morceaux ne sont pas extraits du répertoire classique mais ont été créés pour la circonstance par Guillaume Roussel, le compositeur de la BO. À ma connaissance, seul le "Va pensiero" dans "le chœur des Hébreux" de l'opéra Nabucco de Verdi est bien reconnaissable. Il constitue un magnifique pied de nez puisque la cantatrice va le chanter à l'Opéra de Berlin en 1934 devant toute l'aristocratie nazie, Hitler y compris … En lieu et place de la chevauchée des Wakyries …
Reste à parler du casting en commençant par cette cantatrice interprétée par une émouvante Fanny Ardant. C'est la soprano Sandrine Piau qui prête sa voix à l'actrice dans les morceaux chantés.
Le rôle de Madeleine est tenu par Léa Drucker que j'ai trouvée excellente dans son rôle de femme flouée puis qui trouve les ressorts et l'énergie pour se venger. Une bien belle découverte.
Le banquier indélicat est joué par un très bon Benoit Poolverde dans son rôle d'affairiste sans scrupule. La gifle qu'il se prend lorsqu'il se croit tout permis avec Madeleine, est juste un instant sublime. Un véritable arrêt sur image.
De même Clovis Cornillac, qui joue le rôle du chauffeur de maison et conseiller occulte de Madeleine, pétille de malice dans sa complicité avec Madeleine …
Film très intéressant. Bien sûr, bien des situations paraîtront assez invraisemblables et improbables mais qu'importe, l'aventure est assez enthousiasmante avec cette BO de musique lyrique qui imprègne l'ensemble du film et avec cette histoire de vengeance qui se déguste lentement et à froid.