Afrique coloniale, années 30. Lucien est l'unique policier d'une bourgade. Lâche, fainéant et malhonnête, il est la risée de tous. Jusqu'au jour où il décide de mettre au point une implacable vengeance contre tous ceux qui le méprisent, exploitant justement son image de grand incapable pour déjouer les soupçons.
Tavernier signe ici un film des plus cinglants, portrait au vitriol du colonialisme français. Il y évoque les différences abyssales entre la population africaine et celle de la métropole (que l'on parle de la culture ou de la richesse), ainsi que le racisme quasi systématique. De nombreuses séquences sont ainsi l'occasion de placer quelques mots ou visuels dévoilant cet univers sinistre.
Mais "Coup de Torchon" vaut surtout pour son scénario excellentissime. Outre les bons mots déclamés, c'est la finesse du protagoniste qui vaut le détour. Incarné par un Philippe Noiret en grande forme, cet individu méprisable parvient à jouer les victimes pour paradoxalement abuser de ses ennemis. Sa vengeance apparaîtra alors aussi jouissive que sinistre, ses adversaires n'étant pas vraiment de chics types !
Face à Noiret, on retrouvera quelques seconds rôles réjouissants (Guy Marchand en militaire à grande gueule, Eddy Mitchell en amant attardé et rustre), mais on retiendra surtout les prestation d'Isabelle Huppert en amante sans scrupule, et Jean-Pierre Marielle en proxénète carnassier.
Bref, "Coup de Torchon" est un joli uppercut, sur un sujet peu traité au cinéma.