Cris et chuchotements n'a rien d'un film sympathique.
Apre dans sa mise en scène (qui est sublime), court mais percutant, d'une froideur totale, aux dialogues réduits au strict nécessaire, et aux scènes de douleur à la limite du soutenable (et pourtant ce ne sont que des cris et des corps qui se contorsionnent), il est une petite bombe exigeante et difficile à appréhender.
Ingmar Bergman, qui signe ici son dernier film de cinéma, est d'une cruauté rare dans sa vision misanthrope de trois sœurs et de leur servante qui se déchirent face à la mort de l'une d'entre elle.
Entre visions ultra modernes, à la limite de l'expérimental (par un traitement des couleurs et des sons tout bonnement impressionnant), et ultra rigorisme d'une mise en scène visuellement sublime mais d'une froideur asphyxiante, le film oscille et trouve un étrange équilibre.
Les quatre actrices principales sont impressionnantes, leurs visages, filmés au plus près et sublimement cadrés, passant en un instant de la sévérité la plus pure à un sourire sadique, ou encore à la terreur ou la douleur.
Les dialogues tranchants entre les personnages s'enchainent, entre ces quatre murs rouges, les personnages se détruisent petit à petit. Dans une vision très physique du cinéma, Bergman parvient à mettre mal à l'aise et à dresser d'acides portraits de personnages, méchants, qui manquent l'essentiel, ce qu'une dernière scène, d'une cruelle beauté, révèle avec simplicité : le bonheur d'être vivant et bien entouré.
Conte efficace, parfois trop inaccessible à cause de son austérité esthétique et rythmique (l'ennui, notamment dans une première partie, se fait rapidement sentir), Cris et Chuchotements est un film d'horreur domestique sur des êtres incapables d'aimer et finalement bien seuls et isolés dans leur malheur.
Cruel.