Déjà en 2005, on récompensait Clint Eastwood de l’Oscar du meilleur réalisateur pour Million Dollar Baby. Il faut dire qu’à 75 ans et avec la carrière qu’il a eu, il fallait bien le récompenser à un moment. Ça tombe bien, l’un de ses derniers films est superbe, tiens, voici ton Oscar. Résultat, depuis 16 ans, il a réalisé 14 longs-métrages, loin de la retraite donc…
Par ailleurs, une tendance que l’on a en voyant ses films récents est de les voir comme des films testamentaires, qui parlent de Clint lui-même de son passé, sa gloire et de son image d’aujourd’hui. On en parlait déjà pour Gran Torino, encore plus avec La Mule, et Cry Macho semble avoir été fait dans le même moule. Un Clint vieux, gardant cette image de cowboy, de gloire américaine passée et qui fait face au monde d’aujourd’hui.
En tout cas, c’était mon idée de Cry Macho, un nouveau Gran Torino où, plutôt que de rencontrer une famille d’origine vietnamienne, il va rencontrer un gamin mexicain. Les deux ne s’entendront pas, ne se comprendront pas, mais au fil du voyage et des épreuves traversées ensemble, ils s’apprécieront et ce sera trop la beauté de l’humanité. Mais que nenni, Cry Macho ne s’aventurera pas là-dessus, pour notre plus grand bonheur (ça m’aurait fait chier de voir un Gran Torino en moins bien).
Je suis un grand amateur de Clint Eastwood, L’Homme des Hautes Plaines, Un Frisson dans la Nuit, Le Cas Richard Jewell ou encore Breezy. Malgré tout je n’ai pas tout vu. Je n’ai pas vu Impitoyable ou Million Dollar Baby par exemple et son film absolument acclamé par tout le monde je le déteste, je parle bien sûr de Sur la Route de Madison. Bref…
Je l’avoue, Cry Macho m’a touché. Le film m’a eu et je dois bien dire que je l’apprécie beaucoup. Mais je dois aussi l’avouer, tous les mauvais retours sur le film sont justifiés. C’est vrai, le scénario est particulièrement faible, c’est vrai que le gamin joue particulièrement mal, c’est vrai qu’il y a des moments vachement gênants dans le film. Je ne peux pas le nier. Le passage avec la mère de Rafo est terrible, tout comme sa relation avec le personnage de Marta (ils ont 39 ans d’écart quand même (bon après ça n’a pas l’air de déranger les gens de voir Eastwood avec Meryl Streep alors qu’ils ont 19 ans d’écart (ouais mais là 39 ans d’écart t’exagère vraiment Clint))).
Mais passé la première partie du film, et en plissant les yeux devant la relation bizarre des personnages, le film est beau, le film est mignon. Comme il l’avait fait pour Richard Jewell, il m’a eu ce con, il a réussi à me toucher. Il a réussi à me faire aimer ce salopard de Richard Jewell, car personne, pas même quelqu’un comme Jewell, ne mérite la vie qu’il a eu. Et malgré mon désaccord total avec les idées du personnage, il m’a fait pleurer. Cry Macho, c’est pareil, malgré la médiocrité et les défauts évident du métrage, je l’aime, j’aime Clint, j’aime cette beauté, notamment tout le passage au village.
Le film est plastiquement magnifique, le jeu de clair-obscur sur certains plans est admirable. La beauté de la scène de la chapelle, de la première nuit que passe Eastwood à la belle étoile, on peut trouver tous les défauts que l’on veut à ce film, mais Clint sait manier une caméra, sait réaliser. Et ces plans, accompagnés d’une superbe musique, mettant en scène ce vieux bonhomme, bah ils sont beaux, tout simplement. Moi aimant tant Clint, je ne peux qu’être touché de le voir encore là, à 90 ans.
Je pense qu’il faut arrêter de voir ces films mettant en scène un Clint vieillissant comme des œuvres testamentaires. Voyons plutôt La Mule ou Cry Macho comme des petits films qu’a besoin de faire Clint pour se remémorer ces grandes plaines qui ont fait son succès. Voyons-les comme des parenthèses dans sa filmographie, où, entre ses "grands films" traitant du mythe du héros américain comme American Sniper ou Richard Jewell, Eastwood remet son chapeau pour quelques heures.
On s’était dit que Impitoyable était son western somme qu’il n’aurait plus à y revenir après cela, on a ensuite dit que Gran Torino était le dernier film mettant en scène le personnage d’américain fort et viril qu’incarnait Clint 40 ans auparavant. On dira pareil pour Cry Macho, que c’est son dernier souffle devant la caméra, en plein désert. Mais n'en soyons pas si sûr. Qu’il doit être compliqué de quitter ces terres vides, mais remplies d’histoire. Comme un enfant, Eastwood nous fait croire que c’est la dernière partie qu’il lance avant d’éteindre sa console, mais il en lance une autre avec Cry Macho, et en relancera sûrement une autre, et encore une autre, et encore une autre. Lorsqu’il tombera de fatigue, à 95, 99 ou 105 ans, lorsqu’il mourra devant ou derrière la caméra, puisqu’il ne s’arrêtera pas avant, ce jour-là, nous aurons perdu le dernier grand personnage du cinéma américain. C’est une grande partie de ce dernier qui partira avec Clint. Alors oui, on peut critiquer ce film, tant son scénario est faible, tant il peut être gênant, tant certains acteurs jouent mal. Mais personnellement, voir Clint Eastwood m’a suffi à apprécier son film. Oui, j’avais les larmes aux yeux devant Cry Macho, car savoir qu’il est toujours là me remplit de bonheur et de joie.
Je suis désolé de faire de cette critique, une critique si personnelle, sans réel développement intéressant, mais elle est à l'image de ce que j'ai ressenti pour le film, que de l'amour. Les défauts du film sont pour moi mineur, tant j'ai aimé le regarder.
Continue Clint, ne t’arrête pas.