Singulier triangle amoureux et littéraire que celui de Curiosa avec l'écrivain Paul Louÿs, la romancière Marie de Heredia et le poète Henri de Régnier. Le premier est l'amant de la deuxième qui est l'épouse du troisième lequel est le meilleur ami du premier. S'y ajoutent ponctuellement la maîtresse algérienne de Louÿs et sa future femme, soeur de Marie. Ouf. Outre ses talents d'auteur, Paul était un séducteur patenté et un érotomane distingué. C'est principalement cet aspect-là, via la photographie, que met en avant le premier long-métrage de Lou Jeunet de même que sa liaison passionnelle avec Marie qui y acquiert son émancipation sexuelle. Il faut bien que les corps exultent mais la chair est plus triste que sensuelle malgré les efforts de la réalisatrice qui habille la nudité des amants par une musique électronique volontairement anachronique. Modernité que de crimes on commet en ton nom. Faussement osé, d'un érotisme répétitif et plat, le film cache sous ses atours audacieux un scénario banal qui ne parvient pas à faire comprendre la personnalité profonde de Louÿs et de sa très chair amie, pas plus que du mari trompé et complaisant. Ce pourrait être un vaudeville mais le film se prend très au sérieux avec sa reconstitution d'époque, sa mise en scène souvent maniérée et ses dialogues ampoulés. L'interprétation de Noémie Merlant (qui est beaucoup plus vibrante dans Portrait de la jeune fille en feu) et de Niels Schneider, même fréquemment dépouillés de leurs vêtements, donne quelques couleurs à Curiosa mais ne l'empêche pas d'être assez ennuyeux.