Les « Lebensborn », ou plus communément les enfants de la honte, est une page obscure et relativement méconnue du Troisième Reich puis de la RDA. D’une vie à l’autre s’attaque à ce sujet probablement jamais abordé au cinéma – la démarche de Georg Maas peut d’ailleurs être mise en parallèle de celle de La Vie des autres de Florian Henckel von Donnersmarck : Allemagne de l’Est, Stasi, faits réels. Réalisé par un documentariste, avec au casting toute une pléiade d’acteurs plus ou moins connus (notons la présence de Liv Ullmann, célèbre pour ses nombreuses collaborations avec Ingmar Bergman sur Persona, Cris et Chuchotements ou encore Sonate d’automne), D’une vie à l’autre (Zwei Leben en version originale) est donc un thriller politique/historique aux accents de film d’espionnage, présenté (mais pas nominé) aux derniers Oscars par l’Allemagne.
Le cinéma allemand contemporain est souvent passionnant lorsqu’il s’intéresse à sa propre histoire (notamment les « Deux Allemagne »), et on était en droit d’en attendre beaucoup de ce film acclamé outre-Rhin. Mais l’évidence arrive bien trop tôt : que ça soit par le biais d’une mise en scène lourde, d’un scénario inutilement complexe et d’une narration décousue, D’une vie à l’autre ne convainc pas. Il faut dire que le réalisateur ne semble pas être très expérimenté, et si il sait indéniablement filmer de beaux plans, la mise en scène ne fait preuve d’aucune subtilité : les flashbacks en sépia avec un gros grain photo, les scènes en Allemagne avec un éclairage sombre à l’opposé des scènes en Norvège qui bénéficient d’une lumière aveuglante omniprésente. Des effets de style qui, s’ils arrivent à créer un certain intérêt dans de rares scènes, participent surtout à l’image boursoufflée d’un film très prétentieux dans sa forme.
Et malheureusement, rien ne compense ces erreurs de style dans le scénario qui, s’il a le mérite d’éclairer le spectateur sur des événements occultés de l’histoire allemande, ne s’envole jamais et se définit assez rapidement comme un thriller d’espionnage d’une banalité déplorable. Un peu plus et on aurait pu croire être devant un téléfilm à gros budget (Georg Maas vient de la télé, c’est sans doute un signe). Et ce malgré les performances satisfaisantes de l’ensemble du casting (il faut dire que ça fait plaisir de voir Liv Ullmann dans un rôle important à son âge).
Rien d’exceptionnel dans ce thriller germano-norvégien. Malgré un aspect pédagogique plutôt admirable (mais qui aurait eu davantage d’intérêt dans un documentaire, par exemple), D’une vie à l’autre n’est au final qu’un téléfilm distribué en salles : scénario simplet et bêtement complexifié, effets de réalisations ratés et un ennui ferme pendant une bonne partie du film. Notons cependant une bande-son assez énorme qui appuie avec beaucoup de réussite les scènes de tension du métrage.