Sur son faux rapport à The Mist, Dans la brume tenait la barre de la version franchouillarde de l'oeuvre de King. Sorti à la surprise générale, preuve du nouvel essor des films de genre français, le métrage de Daniel Roby (qui signe sûrement ici le film du début d'une certaine renommée) se tourne vers une vision plus humaine, personnelle, plus intime des quelques thématiques abordées dans The Mist et présentes ici.
Si le film de Darabont fera la part belle à la décadence de l'homme, à l'obscurantisme religieux ainsi qu'aux terribles comportements auxquels se livre l'homme pour sa propre survie (ou plus généralement son intérêt), Roby se tournera vers une vision plus optimiste de la thématique survival/huis clos, sans grand traumatisme ni conclusion ironiquement dramatique, le tout lié par l'amour.
Et même si certains passages se montreront des plus pessimistes, il y aura toujours ce soupçon d'espoir lié aux sentiments exacerbés pour rester dans cette vision plus légère, moins étouffante du genre; que ce soit dans la relation entre Romain Duris et Olga Kurylenko, ou celle qu'ils entretiennent avec leur fille, voir même avec leurs parents d'adoption (le couple de personnages âgées vivant au dernier étage, ultime vestige de l'ancien monde en train de s'effacer pour laisser place au nouveau), le thème de l'amour y trouve une importance capitale.
Le message de conclusion est d'ailleurs intéressant; pour revenir à l'optimisme global de l'oeuvre, revenons sur le passage d'une génération à l'autre; Dans la brume est un peu la représentation artistique de ce fossé aujourd'hui présent entre les parents (du baby-boom ou de la génération 68) et leurs enfants (fin 90-début 2000) élevés avec de nouveaux codes, de nouvelles occupations; démocratisation du gaming, développement des technologies, le monde à porter de main.
Mais d'un autre côté, tout comme cette jeune fille interprétée par Fantine Harduin, le jeune est prisonnier de son "ouverture" particulière au monde; dans sa bulle aussi, il communique avec tout le monde, s'entoure toujours plus de technologies différentes pour ne plus pouvoir vivre sans, finalement. Arrivera la période de l'âge adulte, la responsabilisation, l'amour solide (pour y revenir) et durable, et les technologies laisseront leur place à la construction de sa vie de famille.
C'est au final ce qui s'y passe tout du long, avec une inversion intéressante des rôles, et sans que l'on sache réellement le pourquoi du comment de la brume qui se répand dans tout Paris, il y a possibilité de justifier ce choix par l'interprétation, l'analyse, par le point de vue qu'on a de l'oeuvre elle-même.
On lui reprochera cependant un jeu d'acteur parfois plutôt mauvais (hormis Duris, bon jusqu'à l'apothéose de sa prestation, moment dramatique dans un espace restreint des plus touchants) ainsi que quelques incohérences et longueurs; mais la réflexion de l'oeuvre, sa mise en scène soignée et ses prises de risque (visuelles, principalement) tempèreront la semi-déception liée à ses quelques défauts. A voir, peut-être le nouvel essor des films de genre français.