La nourriture à l'écran, dans la grande majorité des cas, ça ne m'intéresse pas trop. Mais bon, ce contexte de la Révolution grondant à quelques mètres et cette idée du « premier restaurant » a suffi pour me convaincre que « Délicieux » saurait me séduire. À tort. Dès la seconde scène, j'ai senti que quelque chose n'allait pas fonctionner. Trop longue, trop démonstrative, trop caricaturale... J'espérais que ce ne serait qu'une exception, ce sera la norme. Passons quelques plans étrangement complaisants sur les animaux morts, c'est surtout le manque de rythme, la fadeur caractérisant l'ensemble qui surprend. Alors que 1789 semblait l'occasion idéale pour évoquer un moment historique fort, ayant amené des bouleversements profonds (euphémisme), celle-ci est à peine évoquée, de loin, presque jamais exploitée par le scénario.
J'ai beaucoup de mal à comprendre où Eric Besnard a voulu en venir : au moins échappe t-on au biopic traditionnel en imaginant un héros de fiction, mais du coup, que celui-ci représente t-il ? Doit-on vraiment y voir la création des premiers restaurants ou juste une histoire presque imaginée de toutes pièces pour plaire au bon peuple ? Le récit a beau avoir quelques atouts, notamment pour offrir quelques (légères) surprises et se montrer cohérent dans sa construction, ils sont tellement appuyés, mal intégrés au récit
(les « changements de statuts » de Louise)
qu'ils deviennent presque des boulets, aucun élément ne venant vraiment justifier
l'attirance ô combien prévisible entre les deux protagonistes,
d'autant que si j'ai été relativement séduit par Grégory Gadebois, j'ai presque l'impression qu'Isabelle Carré régresse, elle qui était l'une des meilleures actrices de sa génération.
L'écriture dans son ensemble pose d'ailleurs problème, que ce soit les dialogues ou les personnages, les seconds rôles, Lorenzo Lefèbvre peut-être excepté, n'étant guère mieux : la légère ambiguïté perçue chez Benjamin Lavernhe s'estompe trop vite, constat presque « inversé » pour Guillaume de Tonquédec, dont la
« rédemption » n'avait absolument pas été préparée pour qu'elle puisse être crédible
(et pourtant, plusieurs scènes lui en avaient offert l'opportunité!). Certes, quelques beaux plans, très « nature morte », parfois habilement intégrés, parfois moins, cette idée d'une modernité qui ne demande qu'à prendre son envol, mais franchement, un si joli potentiel pour un résultat aussi fade, simpliste, je trouve ça très « français » et, surtout, très dommage. À un moment, Christian Bouillette crie à table « je baaaaaande » : difficile d'en dire autant...