Korean rapsodie
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Ah non ! Des zombies ! Franchement, moi, perso, je commence à en avoir ma claque des zombies ! C’est bon les gars ! On a tout dit ! Passons à autre chose ! …Oui mais bon voilà, c’est coréen, donc au final, ça passe. Non non, je ne rigole pas, c’est vraiment le cœur de mon argumentation : « c’est coréen donc ça passe. » Parce que bon, on ne va pas se mentir –et je le redis parce que je pense plus que très fort – on a vraiment tout dit sur les zombies. Et comme la plupart des films ou séries de zombies qu’on nous a fait ces derniers temps sont soit britanniques, soit américains, le seul truc qui pouvait finalement apporter un un peu de sang neuf au genre, c’était un changement drastique du cadre culturel dans lequel ça se passe. Là – pouf ! – Corée : ça passe. Alors j’exagère un peu. A dire vrai, c’est surtout l’approche cinématographique coréenne que je trouve véritablement intéressante ici. Ceux qui me suivent un peu le savent : j’adore les standards adoptés par ce cinéma coréen qui se déstine à l’export. Les cadres sont propres, la photographie est sublime, tout est incroyablement léché dans ce cinéma. Là, pour ce « Busanhaeng », le réalisateur Sang-ho Yeon a su parfaitement se mettre au diapason de ses compatriotes. Sa maîtrise est totale. Chapeau d’ailleurs dans son rendu des vagues de zombies. Pour le coup, la gestion de la vitesse des gestes est particulièrement bien couplée à un montage fort rigoureusement ajusté (Ah ça ! Savoir donner du rythme sans tomber dans le piège du hachoir à bobine, ce n’est clairement pas donné à tout le monde !) Idem, je trouve qu’il y a dans ce film une excellente gestion de l’espace choisi pour opérer cet actionner/huis-clos/survival. Confiner tout ça dans un train et, plus généralement, autour d’un train, c’est se fixer une certaine contrainte pas évidente mais que le film gère vraiment bien. L’exploitation de toutes les spécificités de l’espace est vraiment bien menée (après ce film, on ne voit plus les portes automatiques, les porte-bagages, les toilettes, et les passerelles de la même manière, surtout quand on constate que les KTX coréens sont les mêmes modèles Alstom que nos TGV à nous !) Aussi, les changements de lieux et de problématiques s’enchainent avec fluidité. Les personnages quant à eux, sans être transcendants, parviennent malgré tout à faire le boulot. Leur grande force vient du fait qu’ils ont tous une marge d’évolution que les péripéties stimulent régulièrement. D’une manière générale, chacun se révèle plus ou moins au travers des sacrifices qu’il est prêt (ou non) à consentir pour les siens. Je trouve même l’idée très intéressante de constater comment, au final, le questionnement de l’altruisme est posé face à ces questions de survie...
Parce que, quand on y réfléchit bien, on se rend quand même compte qu’à de nombreuses reprises, les personnages sont mis face à ce dilemme simple : « est-ce que je prends le risque de sauver ce gars dont je me fous carrément, sachant que ma propre survie reste ma priorité ? » Or, la plupart des personnages qui ont accepté cette prise de risque ont généralement été récompensés. Le clochard sauvé en début de film est celui qui va accepter de se sacrifier pour permettre la fuite de Seok-woo, Sung-kyung et Su-an. De même, Sang-Hwa est celui qui permet la fuite de sa femme et de Seok-woo, chose qui n’aurait pas été possible si Seok-woo n’avait pas accepté in-extrémis de le laisser rentrer au tout début du film. Enfin, si Sung-kyung est sauvée à la toute fin, c’est grâce à la chanson fredonnée par la petite Su-an, chanson qu’elle n’aurait jamais chanté si le mari de ladite Sung-kyung ne l’avait pas sauvé quelques-heures plus tôt dans la gare infestée de militaires-zombies… En gros, on constate même que le groupe serait sûrement arrivé plus nombreux à Busan sans l’intervention des personnages égoïstes qui, en plus de sacrifier les autres, finissent toujours par y laisser quand même leur peau. C’est un propos assez simple, mais qui pour moi passe plutôt bien dans ce genre de film.)
Seuls bémols donc : bah les zombies pour commencer… Au fond, rien de neuf. Mis-à-part le fait que ça se passe dans un train, on l’a déjà quand même vu plein de fois ailleurs. Et puis pour continuer dans les bémols, bah c’est la longueur. Deux heures, pour un survival assez conventionnel, pour moi c’est too much. Mais bon, encore une fois, pour un film de ce genre, au moins « Busanhaeng » a-t-il le mérite de faire la chose avec grande maitrise et avec le minimum de créativité autour de ses conventions éculées (ici dans la gestion du lieu et des personnages). Bref, à défaut d’être une bonne claque, au moins, ce film de zombie coréen, il fait le taf, et il le fait bien. Moi, rien que pour ça, je me dis « merci la Corée ! »
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Créée
le 19 sept. 2017
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