"Derrière la façade" constitue un diptyque officieux avec "Café de Paris", sorti l'année précédente : à chaque fois, les deux compères Yves Mirande et Georges Lacombe travaillent en binôme, aussi bien à l'écriture qu'à la mise en scène.
La découverte il y a quelques années de "Derrière la façade" avait été une jolie surprise, tant ce rassemblement de grands comédiens français dans une comédie policière très théâtrale avait quelque chose de réjouissant voire jubilatoire.
Au point de me risquer à le revoir au bout de seulement quelques années, d'autant que je ne gardais presque aucun souvenir de l'intrigue ni de l'enquête policière.
Malgré cela, ce deuxième visionnage de "Derrière la façade" s'est révélé un brin déceptif : le film s'apparente à une succession de saynètes juxtaposées plus ou moins artificiellement, illustrant les moeurs de la société française des années 30.
Si le ton se veut satirique et si certains sketches égratignent effectivement l'hypocrisie et la mesquinerie de leurs contemporains, l'ensemble s'avère tout de même gentillet, entre caricatures très convenues, humour un peu facile et même retour à la bonne vieille morale bourgeoise (la réconciliation entre Aimé Clariond et Gabrielle Dorziat).
Entre temps, j'avais vu "Café de Paris" qui m'avais beaucoup plu, et semblé un peu plus corrosif dans sa description d'une élite débauchée, et déconnectée des réalités sociales et politiques.
Paradoxalement, la mise en scène de "Derrière la façade" m'a paru meilleure, plus ample, "Café de Paris" se limitant à un seul décor, et ayant tendance à multiplier les gros plans sur les visages.
"Derrière la façade" propose ainsi une gestion pertinente de l'espace, les deux enquêteurs rivaux se mouvant avec aisance dans les différents secteurs de cette copropriété, qui illustre la mixité sociale de l'époque, selon le principe de verticalité (les meilleurs logements sont au rez-de-chaussée).
Au passage, on peut remarquer la forte ressemblance avec "Minuit, quai de Bercy", film des années 50 qui explore pareillement une organisation sociale "immobilière" sous forme de polar whodunit.
Et puis quels que soient ses défauts, le film de Mirande et Lacombe offre le grand plaisir de croiser une incroyable galeries de seconds rôles "magnifiques", la fine fleur des comédiens français de l'époque (Michel Simon, Jules Berry, Gaby Morlay, Erich Von Stroeheim, Julien Carette...), qui n'apparaissent pour certains que le temps de deux-trois scènes, mais qui contribuent à classer "Derrière la façade" parmi les sympathiques divertissements d'avant-guerre.